Vous commencez l'année avec la ferme intention de mieux manger... tant que ça ne vous coûte pas trop cher. Merveilleux : les Nations unies (ONU) ont déclaré 2016 Année internationale des légumineuses. Haricots, pois et lentilles « constituent une source bon marché, délicieuse et nutritive de protéines et de micronutriments essentiels », rappelle l'ONU. On peut même cacher des pois chiches dans des muffins au chocolat...

Ce n'est pas tous les jours que les Nations unies (ONU) parlent de... fèves au lard. Ce plat typiquement canadien-français est mentionné dans le communiqué de l'ONU lançant 2016, Année internationale des légumineuses. « Les légumineuses constituent un ingrédient essentiel dans un grand nombre de plats nationaux ou régionaux, notamment le falafel, le dahl, le piment et les fèves au lard », fait valoir l'ONU.

Pourquoi ne pas avoir déclaré 2016 année du café ou du chocolat, plus réjouissants ? Pour sensibiliser les gens aux nombreux avantages qu'offrent les légumineuses, en stimuler la production, le commerce et en « encourager de nouvelles utilisations intelligentes le long de la chaîne alimentaire », plaide l'organisation internationale.

Populaire houmous

Chez nous, « les légumineuses ont le vent dans les voiles », constate Louis Giguère, vice-président et associé chez Stereofood Box, une entreprise spécialisée en marketing alimentaire. Plusieurs tendances font monter leur cote, notamment la réduction de la consommation de viande (viande rouge dans un premier temps, puis viande tout court), la réduction de la consommation de céréales et la croissance du végétalisme.

« Prenez les pois chiches : ils ne sont plus du tout vus comme tristounets, illustre M. Giguère. Les jeunes aiment le houmous, c'est très populaire, et tout le monde sait que c'est à base de pois chiches. Les plats mexicains, dans lesquels on trouve des fèves noires, et les plats indiens, avec des lentilles, sont aussi des vecteurs de popularisation des légumineuses. Ça fait tomber les barrières à l'égard de ces aliments, notamment auprès de la génération Y, qui adopte davantage les plats de cultures étrangères que ceux qui les ont précédés. »

Prévenir obésité et cancer

A-t-on raison de qualifier les légumineuses de superaliments ? « Aucun aliment ne peut à lui seul être tenu responsable du maintien de la santé, répond Karine Gravel, nutritionniste. Je dirais plutôt que les légumineuses sont des aliments super ! Elles possèdent une valeur nutritionnelle qui peut rendre envieux bien des aliments. Elles sont riches en glucides complexes (dont les fibres alimentaires), en protéines végétales et en vitamines et minéraux. »

Les légumineuses fournissent deux fois plus de protéines que le blé, trois fois plus que le riz. Elles sont économiques : les protéines fournies par les légumineuses sont cinq fois moins chères que celles fournies par le lait, note l'ONU. L'écart de prix avec la viande est encore plus grand. Récemment chez IGA, 100 g de lentilles brunes sèches coûtait 0,30 $, alors que 100 g du boeuf haché le moins cher revenait à 1,48 $.

Pauvres en gras, riches en fer et en zinc, les légumineuses aident à la gestion du cholestérol et à la digestion, en plus de combattre l'anémie. Elles sont « un ingrédient clé » des régimes conçus pour prévenir l'obésité et les maux chroniques tels que le diabète, les maladies cardiaques et le cancer, rapporte l'ONU.

Bâtonnets à effilocher aux fraises et aux pois

Les grands fabricants alimentaires le savent et ajoutent des légumineuses à leurs recettes. Seulement dans l'Union européenne, 3600 nouveaux produits contenant des légumineuses ont été lancés, de janvier 2010 à janvier 2014, selon un rapport d'Agriculture et Agroalimentaire Canada. « Le nombre de lancements augmente chaque année et a presque doublé entre 2012 et 2013 », précise le Ministère.

Quelques exemples étonnants : des bâtonnets à effilocher aux fraises et aux pommes, contenant de la protéine de pois, ont été lancés au Royaume-Uni en 2014. L'Allemagne a vu apparaître une tartinade de mangue et pois chiches pour sandwichs, trempettes et vinaigrettes. En France, on peut désormais acheter des pâtes en spirales composées de semoule de blé dur, de farine de pois et de poudre de persil. Le Québec n'est pas en reste (voir onglet 3).

Les légumineuses souffrent tout de même encore de préjugés, observe Mme Gravel. « On entend dire : " C'est pâteux ", " ça fait péter ", " ce n'est pas un repas ", énumère-t-elle. Il faut travailler à changer ces perceptions. »

Pourquoi peuvent-elles causer maux de ventre et flatulences ?

« Certains glucides complexes des légumineuses ne sont pas complètement digérés, explique Karine Gravel, nutritionniste. Une fois dans le côlon, ils sont fermentés par les bactéries, ce qui peut provoquer des ballonnements et des flatulences. C'est la faute des bactéries et non celle des légumineuses. » Pour éliminer ou réduire ces effets secondaires, voici ses trucs : 

• Bien rincer les légumineuses en conserve avant de les cuisiner.

• Lors du trempage des légumineuses sèches, changer l'eau deux ou trois fois. Ne pas utiliser cette eau pour la cuisson.

• Cuire suffisamment les légumineuses, car il est plus difficile de digérer de l'amidon qui n'est pas assez cuit.

• Consommer des légumineuses sur une base régulière pour permettre au système digestif de mieux s'adapter.

• Augmenter sa consommation de légumineuses progressivement et boire beaucoup d'eau.

Cinq produits étonnants

La Presse a soumis cinq aliments à base de légumineuses à Karine Gravel, docteure en nutrition. Voici son analyse, résumée en quelques points.

Craquelins Breton aux haricots blancs avec sel et poivre de Dare

3,29 $ pour 120 g.

Premier ingrédient de ces biscuits Breton : des haricots blancs secs !

LES PLUS

• Bonne quantité de fibres (3 g par portion de 20 g).

LES MOINS

• Quantité décevante de protéines pour un produit à base de haricots (2 g par portion).

• Longue liste d'ingrédients.

Croustilles de lentilles assaisonnées à l'oignon et au thym, Harvest Snaps

2,99 $ pour 85 g. 

Des chips en forme de pois mange-tout, dont le goût a plu à nos testeurs.

LES PLUS

• Quantités intéressantes de protéines (10 g par portion de 50 g), de fibres (4 g) et de fer (20 % des besoins quotidiens).

• Pas trop salées.

LES MOINS

• Trop de matières grasses (10 g de lipides par portion de 50 g), même si ce sont majoritairement des gras insaturés.

• Longue liste d'ingrédients.

Croustilles au sel de mer et poivre concassé Simply Protein

2,59 $ pour 33 g.

Des chips faites d'un mélange d'isolat de protéines de pois et de flocons de pommes de terre ? Oui, et c'est croustillant, peut-être trop assaisonné.

LES PLUS

• Très riches en protéines, 16 g par sachet de 33 g. Pour comparer, il n'y a que 2 g de protéines dans la même portion de croustilles Ruffles ordinaires. 

• Quantité modérée de calories (140 par sachet).

LES MOINS

• Trop salées (27 % du maximum de sel à consommer par jour dans un sachet).

• Peu de fibres (1 g).

Mélange épicé de légumes et d'orzo pour soupe, Campbell's

4,29 $ pour 180 g.

Un mélange sec à base de pois chiches, de légumes et de lentilles déshydratés, auquel il faut ajouter du bouillon, du jus de citron et des légumes frais.

LES PLUS

• Liste d'ingrédients pas trop longue.

• Bonne quantité de fibres (4 g pour 30 g de mélange).

LES MOINS

• Pas assez de protéines (5 g par portion) pour que ce soit une soupe-repas. 

• Mélange assez inutile : on peut facilement faire une soupe maison avec des pois chiches et des lentilles.

Pois chiches croustillants à la cannelle douce, The Good Bean

4,99 $ pour 170 g.

Des pois chiches sucrés à grignoter ? C'est étonnamment bon.

LES PLUS

• Beaucoup de fibres (5 g par portion de 28 g), dont des fibres insolubles. 

• Quantité intéressante de protéines (5 g).

• Pas trop de calories, pas trop de sel.

LES MOINS

• Un peu plus d'une cuillérée à thé de sucre par portion.

Zoom sur les lentilles et les pois secs

Surprenant, mais vrai : le Canada est le plus grand producteur - et exportateur - de lentilles et de pois secs au monde. Explications en sept points.

  1. Des tonnes et des tonnesPlus de cinq millions de tonnes de légumineuses ont été cultivées au Canada en 2014, estime Agriculture et Agroalimentaire Canada.

    Pois secs : 2,92 millions de tonnes (la plus grande production mondiale).

    Lentilles : 2,1 millions de tonnes (la plus grande production mondiale).

    Haricots secs : 249 000 tonnes.

    Pois chiches : 90 000 tonnes.

  2. Superficie 11 fois plus grandeAu Canada, la superficie ensemencée en légumineuses a atteint 2,2 millions d'hectares en 2011. C'est une superficie 11 fois plus grande qu'en 1981. Le nombre de fermes qui déclarent cultiver des légumineuses a doublé en 30 ans, passant de 6400 à 12 100, selon Statistique Canada.
  3. Ça pousse dans l'OuestOù sont cultivées les légumineuses au Canada ?

    - 73 % en Saskatchewan

    - 24 % en Alberta

    - 2 % au Manitoba

    - 1 % en Ontario

    Source : Pulse Canada, l'Association des producteurs canadiens de légumineuses

  4. Peu présents au QuébecLa production de légumineuses est marginale au Québec.

    En 2014-2015, 5382 tonnes de haricots secs et 183 tonnes de pois secs ont été commercialisées par des agriculteurs québécois. « Nous ne produisons pas vraiment d'autres légumineuses, comme les pois chiches et les lentilles », fait savoir Benoit Legault, directeur général des Producteurs de grains du Québec.

  5. Exportées vers 150 paysL'Inde, la Chine et la Turquie : voilà les pays qui importent le plus de légumineuses du Canada. Les exportations canadiennes représentent plus du tiers du commerce mondial de légumineuses, selon l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO). La valeur de ces exportations est estimée à plus de 3 milliards de dollars US en 2014, selon Pulse Canada.
  6. Des lentilles vraiment vertesFaire pousser des légumineuses exige entre un dixième et la moitié de l'eau nécessaire à l'obtention d'autres sources de protéines, calcule Pulse Canada. Leur culture a aussi des effets bénéfiques sur l'environnement en fixant l'azote de l'atmosphère dans les sols, ce qui améliore leur fertilité. Gros hic : 90 % des fermes canadiennes cultivant des légumineuses ont déclaré utiliser des herbicides ou des engrais chimiques en 2011, rapporte Statistique Canada.
  7. Vingt mille espèces dans le mondeQue sont les légumineuses ? Des « semences comestibles récoltées à l'état de gousse d'une variété de plantes légumineuses annuelles », répond Statistique Canada. Plus de 20 000 espèces ont été répertoriées dans le monde, selon la revue Les diplômés de l'Université de Montréal. Toutes les variétés ne sont toutefois pas comestibles ; certaines sont même hautement toxiques.

Muffins aux pois chiches, aux framboises et au chocolat noir

Recette : Elisabeth Cerqueira, nutritionniste

Ces muffins ne sont pas chiches : chacun fournit 7 g de protéines et 5 g de fibres. Autres atouts : ils sont sans arachides ni noix.

Pour 12 muffins

Ingrédients

• 1 boîte de 540 ml (19 oz) de pois chiches, égouttés et rincés

• 125 ml (1/2 tasse) de lait, de boisson d'amande ou de soya

• 4 gros oeufs

• 30 ml (2 c. à soupe) d'huile de canola ou d'olive

• 5 ml (1 c. à thé) de poudre à pâte

• 125 ml (1/2 tasse) de compote de pommes non sucrée

• 60 ml (1/4 tasse) de raisins secs ou de canneberges séchées

• 125 ml (1/2 tasse) de yogourt grec nature

• 250 ml (1 tasse) de flocons d'avoine

• 250 ml (1 tasse) de framboises surgelées

• 125 ml (1/2 tasse) de brisures de chocolat noir

Préparation

1. Préchauffer le four à 200 °C (400 °F).

2. Dans un robot culinaire, réduire les pois chiches en purée homogène avec le lait ou la boisson végétale.

3. Ajouter les oeufs et mélanger de nouveau.

4. Ajouter ensuite le reste des ingrédients et mélanger afin d'obtenir une préparation bien homogène.

5. Répartir la pâte dans des moules à muffins huilés ou contenant des caissettes en papier. S'assurer qu'il y a du chocolat dans tous les moules afin pour d'obtenir un bon goût sucré.

6. Déposer une ou deux framboises sur le dessus de la pâte.

7. Cuire sur une grille placée au centre du four pendant 25 à 30 minutes ou jusqu'à ce qu'un cure-dents inséré au centre d'un muffin en ressorte propre.

8. Laisser refroidir sur une grille avant de démouler.

PHOTO OLIVIER JEAN, LA PRESSE

Ces muffins ne sont pas chiches: chacun fournit 7g de protéines et 5g de fibres. Autres atouts: ils sont sans arachides ni noix.