Pourquoi condamner bébé aux purées fades alors que tout un monde de saveurs s'offre à ses nouvelles papilles ? Car il est possible, tout en respectant de simples conseils nutritionnels sur l'introduction des aliments, d'égayer les petits plats de votre bambin et d'en faire un véritable foodie... comme ses parents !

Le merveilleux monde des purées

Quand la première fille de Michele Oliver a eu 6 mois, elle a essayé différentes purées proposées sur le marché. «C'était tellement ennuyant ! Je ne comprenais pas comment ma fille - et n'importe qui d'ailleurs ! - pouvait manger ça !», se souvient-elle.

Elle a donc commencé à expérimenter en créant ses propres purées, avec des aliments biologiques : pommes et cannelle, patates douces et curry... «Je goûtais à tout ; si ce n'était pas bon, je ne les gardais pas. Le but était de s'amuser, mais ma fille a tellement aimé ça, elle n'arrêtait plus d'en manger !», explique la maman de deux enfants, qui vit à Denver.

De là est née une idée : lancer un blogue où elle pourrait communiquer ses recettes de purée originales et délicieuses à d'autres mamans. BabyFoodE était né. Lancé en 2013, le blogue connaît un succès fou, au point où Mme Oliver quitte son emploi pour se consacrer à sa passion. En 2015, elle lance même son livre de recettes, Little Foodie.

Son approche est simple : la nourriture que vous donnez à votre bébé, au fond, ressemble beaucoup à ce que vous, adultes, mangez... Seulement, elle se présente sous forme de purée ! Un concept qui fait mouche, puisque, aujourd'hui, des foodies de partout sur la planète cuisinent ses appétissantes recettes de purées et de plats pour enfants, que la maman met en valeur dans de superbes photos léchées.

Sortir des carcans

C'est le même genre de réflexion qui a mené la nutritionniste Julie DesGroseilliers à publier son livre Bébé a faim, cet automne. «Lorsque j'ai eu ma fille, qui a aujourd'hui trois ans et demi, j'étais super excitée à l'idée de lui donner ses premiers repas. Je suis donc partie magasiner des livres sur les purées... Méchant turn-off ! Les recettes étaient plates et pas originales. La purée de carottes, c'est bien, mais il y a autre chose !», s'indigne-t-elle.

Son conseil ? Osez mélanger les aliments ! «Certains parents croient encore qu'il faut donner les aliments seuls, sans les mélanger, constate-t-elle. C'est important de le faire lorsqu'on introduit un nouvel aliment, mais après deux ou trois essais sans réaction allergique, on peut créer des mélanges et oser. C'est là que ça devient foodie et amusant !»

Par exemple, combinez les légumes racines ensemble, ajoutez des épinards à vos purées de fruits, écrasez ensemble banane et avocat, servez au petit-déjeuner de l'avoine avec du lait de coco, ajoutez le goût sucré de la pomme à une purée de poulet... Les possibilités sont presque infinies.

De même, pourquoi les graines de chanvre ou de chia, le chou frisé, le quinoa ou les edamames, autant d'aliments auxquels on accole l'étiquette de «super», seraient-ils réservés aux adultes ? En effet, il serait fou de priver les bébés et les enfants de leurs vertus nutritionnelles, ajoute-t-elle.

Explosions de saveurs

En octobre dernier, le chef Danny St-Pierre a publié sur sa page Facebook une photo de son bébé, alors âgé d'à peine 7 mois, avec la description suivante : «Jeannette mange de l'aiglefin aux courgettes safranées et raisins blonds.» C'est ce qui nous a donné l'idée de lui demander son avis sur la question. Qui de mieux placé qu'un chef pour créer une nouvelle génération de bébés foodies ?

Après avoir introduit les purées dès 4 mois - «elle avait trop faim !» -, le papa a très vite délaissé les purées pour des pièces braisées, en cuisson lente, que sa fille adore, comme des cuisses de poulet ou des jarrets de boeuf, qu'il fait mijoter dans un bouillon avec des légumes jusqu'à ce que le tout soit fondant et délicieux.

Et il n'hésite pas à assaisonner son bouillon ! «Je me suis rendu compte qu'un peu de sel, ce n'est pas la fin du monde. Et si je fais une purée de pois vierges, je vais mettre du beurre... La voudrais-tu, toi, la purée sans beurre ? Je ne pense pas !», lance-t-il.

Au royaume des herbes et épices

Dans cet esprit, nul besoin d'attendre que bébé soit plus vieux pour l'initier aux épices et aux herbes. Suivez votre instinct et laissez aller votre imagination : poulet et cumin, mangue et cari, bleuets et romarin, petits pois et menthe...

Pour Mme Oliver, non seulement les épices et les herbes développent la palette des bébés et rehaussent les saveurs des aliments, mais elles sont aussi très bonnes pour la santé. «Elles ont des propriétés médicinales, par exemple, la menthe et le gingembre sont très bons pour la digestion, la cannelle stimule l'activité cérébrale, alors que les clous de girofle aident au développement des os.» Une raison de plus pour ouvrir son armoire à épices !

Photo tirée du blogue BabyFoodE

Quelques balises à suivre

Autrefois assez rigides, les règles pour l'introduction des aliments chez les poupons se sont assouplies et laissent surtout davantage de place à l'imagination. Voici quelques balises à suivre pour que les premiers repas de bébé - et les suivants ! - se déroulent sans anicroche.

4 à 6 mois

Officiellement, au Québec, on recommande aux parents d'attendre que bébé ait 6 mois pour lui donner ses premières bouchées. Mais, officieusement, de nombreux spécialistes de la santé vont désormais parler de 4 à 6 mois, chaque enfant ayant son propre rythme de développement. Comment savoir si bébé est prêt ? Il est capable de se tenir assis dans sa chaise haute, il tient et tourne facilement sa tête et il a l'air intéressé par ce que vous mangez et suit la nourriture des yeux. S'il ouvre la bouche lorsque vous lui présentez une cuillère, bingo ! S'il détourne la tête ou recrache, il est peut-être préférable d'attendre encore un peu.

D'abord, le fer

Il est désormais recommandé de donner à notre enfant des aliments riches en fer en premier. Pourquoi ? Car c'est entre 4 et 6 mois que les réserves naturelles en fer de bébé commencent à s'épuiser et que le lait - maternel ou de préparation - ne suffit plus à combler ses besoins. Pour éviter les carences, les céréales enrichies de fer sont un choix évident, mais on n'hésite pas non plus à essayer les purées de viande (poulet, veau, agneau, cheval), de poisson ou même d'autres aliments riches en fer, comme le tofu ou les légumineuses - cependant, il faut savoir que le fer d'origine végétale est moins bien absorbé par l'organisme.

Exposition aux allergènes

Pendant longtemps, il a été recommandé aux parents de retarder le plus longtemps possible l'exposition aux allergènes les plus fréquents (oeufs, noix, blé, poisson). Mais de nouvelles études ont démontré que les enfants qui ont été exposés le plus tôt possible aux allergènes ont moins d'allergies que des groupes d'enfants exposés plus tard. C'est particulièrement vrai si votre enfant est considéré comme à risque en raison d'antécédents familiaux : le plus tôt est le mieux !

Oui aux bons gras

C'est simple : le gras, c'est bon ! Il ne faut surtout pas restreindre les matières grasses pour les tout-petits. On oublie les fromages allégés et autres yogourts à 0 %, on ajoute sans remords des huiles (olive, avocat, noix de coco) ou même du lait de coco aux recettes et on fait cuire notre riz avec une noix de beurre.

À éviter

Alors, oui aux expérimentations culinaires, mais avec certaines limites. Ainsi, il ne faut pas donner de miel aux enfants de moins de 1 an à cause des risques de botulisme. Leur système immunitaire étant encore fragile, les viandes, poissons et oeufs crus ou pas assez cuits sont aussi à éviter, ainsi que les aliments non pasteurisés (jusqu'à 5 ans). Côté sel et sucre, il est recommandé également de les éviter le plus possible durant la première année d'existence.

Alimentation autonome

C'est la tendance dont tout le monde parle ces temps-ci. L'alimentation autonome du bébé (baby-led weaning en anglais) suggère de sauter le stade des purées pour donner dès le départ au bébé des aliments solides en morceaux, qu'il porte lui-même à sa bouche. Si cette méthode encourage l'autonomie, elle demande aussi au parent beaucoup de patience et d'attention portée aux risques d'étouffement. Pourquoi ne pas faire un peu des deux, en déposant des morceaux de fruits et légumes mous (poire, concombre, banane) sur son plateau en complément de la purée ?

PHOTO MASTERFILE

Des idées de recettes

Quelques recettes simples et délicieuses de purées, tirées du blogue BabyFoodE.

PURÉE DE BANANES + LAIT DE COCO + CANNELLE

Ingrédients



1/2 banane, pelée

1 à 2 cuillères à soupe de lait de coco (non allégé !)

1/4 de cuillère à thé de cannelle

Préparation



1. Placer la banane dans un petit bol et l'écraser à la fourchette, jusqu'à la consistance désirée.

2. Mettre la banane au micro-ondes environ 10 secondes, mélanger et répéter jusqu'à ce que la purée soit tiède.

3. Mélanger le lait de coco et la cannelle, et servir.

PURÉE DE BROCOLI + ASPERGE AVEC ESTRAGON

Ingrédients



3/4 de tasse de fleurons de brocoli

1/2 tasse d'asperges, parées et coupées

1/4 de tasse de fèves vertes, parées et coupées

2 poires, pelées et coupées

1/2 cuillère à soupe d'estragon, finement haché (peut être remplacé par de la menthe, du persil, de la coriandre ou de la ciboulette

Préparation



1. Dans une moyenne casserole, cuire à la vapeur dans une marguerite les brocolis, asperges et fèves vertes, environ 15 minutes.

2. Ajouter les poires et l'estragon et cuire à la vapeur cinq minutes supplémentaires. Réserver l'eau de cuisson.

3. Mettre tous les ingrédients dans un robot ou mixeur et réduire en purée jusqu'à la consistance désirée. Ajouter un peu d'eau de cuisson si nécessaire.

FLOCONS D'AVOINE AVEC FRAISES + GRAINES DE CHIA

Ingrédients



2 tasses de fraises, équeutées (fraîches ou congelées)

1/2 cuillère à soupe de graines de chia

2 cuillères à soupe de miel (si bébé a moins de 1 an, omettre ou remplacer par du sirop d'érable ou d'agave)

1 cuillère à thé d'extrait de vanille

1/2 tasse de flocons d'avoine

Garniture 



Une pincée de graines de chia et une cuillère à soupe de lait ou de crème.

Préparation



1. Dans une petite casserole, amener 1 tasse d'eau à ébullition. Ajouter les flocons d'avoine, réduire le feu et laisser mijoter de 5 à 10 minutes, jusqu'à ce que le liquide soit absorbé. Réduire en purée si désiré.

2. Dans une moyenne casserole, placer les fraises avec 2 cuillères à soupe d'eau et laisser mijoter environ 5 minutes à feu doux, en brassant régulièrement.

3. Transférer les fraises dans un robot avec le miel, la vanille et les graines de chia. Réduire en purée jusqu'à la consistance désirée.

4. Dans un petit bol, alterner des étages de purée de fraises et de flocons d'avoine. Saupoudrer quelques graines de chia et arroser avec un peu crème. Servir.