Dans la multitude de présentations à la Semaine de la mode de New York, un défilé pourtant modeste a suscité beaucoup d'intérêt, car il fait entrer pour la première fois au Lincoln Center une mode «grandes tailles».

Dans l'univers ultra-filiforme de la Semaine de la mode, où les tailles 0 sont la norme, Eden Miller, créatrice new-yorkaise aux rondeurs joyeusement assumées doit présenter vendredi six mannequins voluptueuses, pour une mini collection colorée où l'imprimé règne en maître.

Costumière depuis 25 ans, elle a lancé sa ligne Cabiria en avril. En juillet, alors qu'elle réfléchit à la suite après de premiers résultats «bons, mais inattendus», elle est contactée par le Fashion Law Institute, qui conseille et aide de petits designers talentueux n'ayant pas les moyens de se produire seuls.

«C'est un honneur incroyable, c'est absolument fantastique, a-t-elle confié à l'AFP avant le défilé. «C'est une formidable opportunité pour défendre la mode grande taille, car c'est aussi de la mode, qui peut être mesurée comme les autres formes de mode».

Passionnée, elle explique sans se départir d'un immense sourire comment elle travaille sur les coupes, les biais, la silhouette, avec toujours à l'esprit de mettre en valeur le corps des femmes qui lui ressemblent.

«C'est coupé et fait pour elles, en pensant à elles. Et elles se sentent belles, et cela me motive et me conduit à penser en grand», ajoute-t-elle.

Imprimé proportionné

Son arrivée à la Semaine de la mode s'est fait presque par accident.

«Quand j'ai rencontré Eden, elle portait une de ses robes. Je ne me suis pas dit 'jolie collection pour femmes fortes', mais 'jolie collection, j'aimerais qu'il y ait ma taille'», explique la professeure Susan Scafidi, du Fashion Law Institute, qui présente Cabiria et cinq autres créatrices vendredi.

«Je n'ai réalisé que plus tard que Cabiria serait la première collection grandes tailles à être présentée sous les tentes du Lincoln Center», ajoute-t-elle, fière désormais d'avoir écrit «l'histoire par accident» et d'aider ainsi «les grandes tailles à sortir du placard».

Eden Miller, dont la collection est destinée aux tailles 12 à 24 aime les imprimés, et ne s'en prive pas.

«Si vous êtes forte, ce n'est pas la peine de prétendre que vous êtes menue», affirme-t-elle. «Un imprimé à petits motifs ne marchera pas. Mieux vaut un imprimé qui sera proportionné à votre taille, dans lequel une femme mince serait noyée».

Elle porte une cinquantaine de tatouages, dont une chauve-souris, un rat, deux coccinelles et un scarabée sur les bras, des serpents sur les mollets. «J'aime les animaux», explique-t-elle en riant.

Elle espère que son défilé, en offrant une petite place aux grandes tailles à la Semaine de la mode de New York, causera des changements dans un pays où la moyenne des femmes font une taille 44 (14).

«J'espère vraiment que les collections dont la qualité les qualifie pour la Semaine de la mode, mais qui en ont été exclues parce qu'elles sont destinées aux femmes fortes, seront invitées» à l'avenir, comme les autres, dit-elle.

À Milan, c'est déjà le cas depuis plusieurs années, avec les défilés d'Elena Miro.