Ça, ce n'était pas prévu. La sonnette qui retentit et la délégation d'amis qui arrive à l'improviste pour l'apéro. Heureusement, il y a des bouteilles au frigo. Et tout ce qu'il faut pour confectionner, en trois tours de mélangeur et autant de minutes, une tapenade qui tape dans le mille. Provençale, fraîche et conviviale, elle donnera immanquablement le goût à vos hôtes de repasser par vos quartiers.

Non seulement la tapenade est-elle ultrarapide à concevoir, mais le résultat aura aussi de quoi ravir un palais asséché par l'été. Surtout, «elle est impossible à rater», comme l'évoque si bien Hugues Gressot, tenant du Massillia, bar marseillais de l'avenue du Parc. Et pour cause: les ingrédients requis offrent toute latitude aux chefs en herbe.

On retrouve certes une base classique, agrémentée d'olives noires ou vertes, d'anchois marinés, d'ail, de câpres et d'huile d'olive, mais chacun peut mettre sa recette au point. Tenez: M. Gressot ne s'est pas gêné, lui qui a tiré un trait sur les câpres - bien qu'elles soient à l'origine étymologique du mot tapenade (tapeno signifie câpres en provençal)! En revanche, il a décidé de verser une dose de... pastis, laquelle procure à la mixture une saveur anisée aussi discrète qu'agréable. «C'est ma propre recette, ça relève un peu et ça donne un goût original», explique-t-il avec son bel accent du sud-est de la France.

De son côté, Jonathan Garnier, chef cofondateur de la Guilde culinaire et Niçois d'origine, invite aussi à utiliser le meilleur des ingrédients: la créativité. «Aujourd'hui, on voit des tapenades avec des tomates séchées, des noix de pin, des amandes ou des noisettes, comme on ferait des variantes de pesto. Pourquoi ne pas ajouter une base de moutarde, du maquereau fumé ou du citron confit? La tapenade, ça peut être un peu le "vide-frigo" ", propose-t-il. Sans oublier les herbes de Provence, le persil, etc.

Aussi bienvenues, les touches d'alcool peuvent apporter une autre dimension à la recette; le chef suggère par exemple d'y déverser une larme de cognac. «J'ai déjà vu des tapenades au champagne!», souligne-t-il.

Simplement savoureux

En ce qui a trait à la préparation, inutile de sortir votre carnet de notes. Hugues Gressot place tous les ingrédients dans le mélangeur, appuie sur le bouton "marche" et récupère la purée. Point. Enfantin, vous dit-on! Certains s'échinent à écraser le tout au pilon et au mortier, mais il faut alors ajouter gouttes de sueur et huile de coude à la liste des ingrédients...

La seule bourde possible serait d'avoir la main lourde sur l'huile d'olive, ce qui donnerait une purée trop liquide. Pour y remédier, il suffit de l'incorporer progressivement, jusqu'à obtenir la texture voulue.

Pour une touche finale plus tape-à-l'oeil (la mixture noirâtre n'étant pas des plus esthétiques), ne pas hésiter à ornementer le tout avec une feuille de basilic, une demi-tomate cerise, une branche de romarin ou encore, soyons fous, une pincée d'oeufs de lompe rouges.

La petite astuce de Jonathan Garnier: passer les ingrédients sous l'eau avant de commencer. «Une tapenade, ça reste assez salé. Mieux vaut prendre le temps de tout rincer pour réduire le taux de salinité», préconise-t-il.

Vient enfin la question de la température de service. Preuve ultime que chacun concocte la tartinade comme cela lui chante, nos deux interlocuteurs ont formulé une réponse opposée... en avançant le même argument! «Les saveurs se libèrent et se distinguent davantage», ont symphoniquement répondu Jonathan Garnier (qui conseille de servir à température ambiante) et Hugues Gressot (qui préfère la tapenade refroidie).

Froide ou tiède, olives noires ou vertes, avec ou sans câpres. Quoi qu'il en soit, la formule sera toujours gagnante; de quoi inciter vos invités à revenir sonner à votre porte, s'ils passent dans le quartier, à l'heure de l'apéro!

Des racines provençales

Les racines de la tapenade remontent jusqu'à l'Antiquité, son destin méditerranéen étant lié au câprier, arbre dont les fruits constituaient autrefois l'ingrédient dominant de la recette. La composition actuelle, où l'olive prime, a été ciselée en Provence, dans le sud-est de la France, et peut-être plus précisément à Marseille (fait ô combien débattu). À noter que des recettes similaires, comme l'olivada, existent tout autour de la Méditerranée.

Rasades et tapenades

Idéale pour les apéros des jours chauds, la tapenade s'accompagne naturellement d'un petit verre. Lequel? Jonathan Garnier débouche aussitôt la question: «Le mariage classique, c'est avec un rosé de Bandol ou de Listel. Si l'on préfère aller vers le blanc, je suggère quelque chose d'un peu sucré pour venir contrebalancer l'acidité de l'olive noire.» Des bulles avec ça? Notre chef nous oriente vers un Bisol, mousseux italien à l'effervescence agréable.

Du côté d'Hugues Gressot, l'apéro, c'est l'apéro. Il propose plutôt un Muscat, un Pineau, ou encore un Lillet - autant d'apéritifs classiques. Sans oublier, évidemment, le roi pastis et son fier anis.

Quelles olives choisir?

Avec un brin de nostalgie, Jonathan Garnier, de la guilde culinaire, nous parle des olives qu'il cueillait avec son père, en Provence, destinées à finir en purée. Qu'elles sont loin, les caillettes et les picholines! Si loin qu'on les trouve très difficilement au Québec. Mais bien d'autres olives font l'affaire.

Une olive noire charnue

Aux dires de Charles Perrin, de l'épicerie fine Olives et café noir, une variété d'olive noire charnue et dénoyautée (c'est moins fastidieux!), très classique, est suffisante. Elle donnera une purée plus acide. «L'olive noire étant un peu plus fade, on peut augmenter la dose de câpres», suggère M. Perrin.

Une tendre olive verte

Même principe pour l'olive verte: le gros gabarit est privilégié. «Le résultat avec les vertes sera plus fruité, plus doux», annonce Charles Perrin. Le jus de citron est le bienvenu dans ce mélange. Pas besoin de chercher midi à quatorze heures, une belle olive verte de qualité, d'Espagne ou d'ailleurs, marche à tous les coups.

Une kalamata parfaite

«Pour moi, la kalamata est tout simplement parfaite pour la tapenade», juge Jonathan Garnier. Avec une belle couleur tirant sur le rouge et une texture intéressante, cette olive grecque demeure LA variété sur laquelle miser. «Elle donnera un rendu un peu plus vinaigré", prévient Charles Perrin. À tester absolument!

La tapenade au pastis du Massillia

> Ingrédients

300 g d'olives noires

2 ou 3 anchois marinés

2 gousses d'ail

1 filet d'huile d'olive (1 ou 2 c. à soupe environ)

1 dose de pastis (entre 20 et 40 ml)

1 c. à thé de citron (optionnel)

5 ou 6 câpres (optionnel)

> Préparation

Mélanger les ingrédients au robot-mélangeur ou au mélangeur à main jusqu'à l'obtention d'une purée homogène. Refroidir si désiré.

La tapenade d'olives vertes de la Guilde culinaire

> Ingrédients

125 ml (1/2 tasse) d'olives vertes dénoyautées

45 ml (3 c. à soupe) de câpres rincées à l'eau

45 ml (3 c. à soupe) d'huile d'olive extra-vierge

60 ml (4 c. à soupe) d'ail rôti au four

30 ml (2 c. à soupe) de vinaigre balsamique blanc

15 ml (1 c. à soupe) de jus de citron

1 branche de thym effeuillé

Poivre au goût

> Préparation

À l'aide d'un robot, réduire en purée tous les ingrédients. Conserver dans un petit contenant hermétique. Recouvrir d'une couche d'huile d'olive pour prolonger la conservation au frigo.