Cabernet jura, Souvignier gris ou Muscat bleu, ces cépages sont encore méconnus, mais plus pour longtemps, estiment certains experts. Ces hybrides, plus résistants aux maladies que les variétés traditionnelles, sont considérés par plusieurs comme les cépages du 21e siècle.

Les premiers hybrides ont été créés au 19e siècle dans le but de freiner les ravages d'un puceron, le phylloxéra. Ces croisements entre différentes variétés de vignes étaient accompagnés de défauts de taille: les vins contenaient souvent de mauvais tannins et certains avaient mauvais goût. 

Plus maintenant, affirme l'ingénieur agronome Olivier Yobrégat à l'Institut français de la vigne et du vin (IFV). Les chercheurs ont mis au point de nouveaux hybrides résistants aux principales maladies de la vigne, comme le mildiou et l'oïdium, et qui produisent de meilleurs vins. 

«Certains vins à base d'hybrides, en particulier les rosés, sont comparables à ceux élaborés avec des Vitis vinifera (variétés européennes)», soutient le spécialiste. 

Vincent Pugibet du domaine de la Colombette à Béziers, dans le Languedoc, croit aussi au potentiel de ces nouvelles variétés. Le vigneron possède 20 hectares d'hybrides avec lesquels il vinifie deux vins, un blanc et un rouge, sous le nom d'«Au creux du nid». 

«Ces cépages apportent une vraie solution à toutes les questions environnementales, comme l'utilisation de pesticides, insiste M. Pugibet. En plus, ces cépages produisent des vins de qualité et qui ont une personnalité unique.» 

Olivier Yobrégat affirme que ces nouveaux cépages sont recherchés auprès des pépiniéristes. Le problème: peu de plants sont en vente. La production de vins avec ces variétés reste encore très marginale. 

Le pépiniériste suisse Philippe Borioli cultive depuis une vingtaine d'années ces nouveaux cépages. Il constate l'engouement pour ces variétés. Depuis cinq ans, ses ventes d'hybrides ont cru de 10 à 30%. Les plus populaires sont le Cabernet blanc, le Cabernet jura et le Souvignier gris. Plusieurs variétés n'ont cependant pas encore de noms, dit-il. 

Les défis 

La disponibilité des plants n'est pas le seul obstacle à la culture de ces nouveaux hybrides. Ils sont plus chers à l'achat que les variétés traditionnelles. De plus, les viticulteurs ne reçoivent pas de subventions de l'Union européenne pour les planter, car ces cépages n'ont pas été inscrits dans les catalogues officiels des états. Pour cela, il faut des années de test et de vérification, explique M. Yobrégat. Ces aides financières sont considérables. Elles s'estiment à 10 000 euros (14 000$) par vignoble. 

M. Borioli croit malgré tout que ces nouveaux cépages constituent l'avenir du vignoble européen. Étant donné que de nouveaux hybrides, encore plus résistants aux maladies, sont sur le point de faire leur apparition sur le marché. 

Au Québec, ces hybrides ne sont pas encore en vente. Le pépiniériste Alain Breault, en Montérégie, estime toutefois que les vignerons québécois possèdent déjà d'excellents cépages qui sont beaucoup résistants aux maladies que les variétés traditionnelles. 

«On est en avance sur les Européens, croit M. Breault. On cultive déjà des cépages résistants à notre climat et à nos maladies.»