Saupoudré généreusement sur tous les trios du Canadien, Brandon Prust est devenu la bougie d'allumage favorite de Michel Therrien en saison régulière. Mais s'il est vrai que les séries réclament du jeu encore plus viril, si l'on ne peut laisser au vestiaire que sa montre et ses tracas, la contribution de Prust sera encore plus significative à compter des prochains jours.

Déjà, Prust a reçu le trophée Jacques-Beauchamp remis à la quatrième étoile du Tricolore. Mais ce n'est pas la première fois qu'il obtient ce genre d'honneur. Chez les Rangers de New York, en 2010-2011, les amateurs ont reconnu qu'il avait donné une performance au-delà des attentes et lui ont attribué le trophée Steven McDonald, du nom de l'officier qui le remet chaque année à un Blue Shirt.

Prust avait payé le prix cette année-là. Traînant une blessure à l'épaule droite semblable à celle qui importune actuellement sa gauche, l'attaquant ontarien répétait la même phrase à ceux qui s'enquéraient à son sujet: «C'est juste de la douleur.»

Il a attendu l'élimination des Rangers pour se faire opérer. Tant que son équipe jouait, il était au rendez-vous.

Ce n'est peut-être pas un hasard si l'oeuvre caritative à laquelle Prust collabore donne justement dans l'acceptation de la douleur.

«Mon tournoi de golf soutient un organisme appelé Kids Kicking Cancer, qui permet à des enfants malades de poursuivre leurs traitements tout en participant à des cours de karaté, explique-t-il. L'enseignant leur donne des trucs, leur apprend à bien respirer. L'idée est d'aider les jeunes mentalement à composer avec la douleur et de leur changer les idées.»

Un mantra de séries

Durant ses deux années et demie passées à New York, Prust n'a raté aucun match des Rangers. Il s'est d'ailleurs amené à Montréal avec la plus longue séquence de matchs consécutifs parmi tous les joueurs du CH.

Ajoutez à cet engagement total la meilleure saison offensive de sa carrière - cette fameuse campagne 2010-2011 - et on le comprend d'hésiter quand on essaie de lui faire accepter l'idée qu'il a tenu cette année à Montréal le rôle le plus important de sa carrière.

«J'aime croire que j'ai eu un impact semblable à New York, dit-il. Tout a été une question d'opportunité. À ma dernière saison à Calgary, je jouais trois minutes par match, parfois une seule présence par période. Tandis qu'en arrivant à New York, John Tortorella m'a dit de montrer ce que j'avais dans le ventre et ma confiance s'est alors décuplée.»

Mais aujourd'hui, c'est le Canadien qui en bénéficie. Et c'est à ses coéquipiers de Montréal et non de New York qu'il répète que «c'est juste de la douleur».

Quel beau mantra à l'aube des séries!

Une dimension de plus

Prust a dominé le Tricolore avec 10 combats cette saison. Qu'est-ce qui a poussé ce patineur de 6 pieds et 195 livres à devenir aussi volontaire pour jeter les gants?

«À mon arrivée chez les Knights de London, à 18 ans, je jouais assez physique, explique-t-il. Je savais qu'à la façon dont je jouais, j'allais devoir répondre de mes actes et me battre de temps en temps. Or, mon meilleur ami au sein de l'équipe était Chris Bain, le goon de la formation. Après les entraînements, il m'apprenait à me battre. Au fil du temps, j'ai réalisé que j'avais vraiment le tour.

«C'est quelque chose que je voulais ajouter à mon arsenal. Mes autres atouts m'auraient peut-être amené à la LNH, mais dans un rôle plus incertain. J'avais besoin d'une dimension qui me permettrait de me distinguer et de me rendre unique.

«La robustesse est encore très importante au hockey, ajoute-t-il. C'est ce qui rend encore plus utiles les joueurs capables à la fois de jouer et de se battre. Chez le Canadien, tout le monde joue au moins dix minutes par match. Il n'y a personne qui est employé seulement trois minutes. Alors il faut que tu saches jouer.»

Surtout ne pas reculer

Prust n'a rien d'un poids lourd et, de son propre aveu, il ne cherche pas à intimider l'adversaire.

Mais baisser l'échine? Ça non. C'est une question de fierté.

«J'étais un fan des Leafs quand j'étais jeune et j'aimais Wendel Clark, car c'était un guerrier. Il faisait tout et il ne reculait devant personne.»

C'est en plein ce qu'a fait l'ailier de 29 ans, le 3 mars dernier, en engageant le combat avec Milan Lucic, des Bruins de Boston. «Ne reculer devant personne», voilà les mots qu'il a employés dans le vestiaire après la victoire du CH.

Combien seront-ils chez le Tricolore à se dire la même chose, au début de la semaine prochaine, alors que se mettra en branle la première ronde?

La réponse à cette question pourrait déterminer l'allure de la série.

***



User de ses poings avec intelligence


Brandon Prust a découvert Montréal il y a quelques années lorsqu'il s'est mis à fréquenter l'animatrice de télé Maripier Morin. «J'aime l'ambiance de la ville, j'aime sa culture. Je n'en suis pas certain, mais je suis probablement l'un des premiers joueurs du Canadien à habiter sur le Plateau Mont-Royal.» L'attaquant de 29 ans dit se plaire à avoir autant de restaurants et d'épiceries autour de chez lui.

De quoi a l'air l'entraînement estival d'un bagarreur? Prust donne rendez-vous l'été à Sam Stout, un combattant ultime MMA qui, comme lui, est originaire de London. «Nous nous sommes rencontrés il y a à peine trois ans et nous sommes devenus bons amis. M'entraîner avec lui permet d'augmenter la puissance de mes coups. C'est également excellent pour le cardio. Je frappe beaucoup de la main droite et j'essaie de développer ma gauche avec lui.»

C'est en 2010-2011 que Prust a atteint ses meilleurs résultats offensifs en marquant 13 buts en plus d'ajouter 16 mentions d'aide en 82 matchs. Ça ne devrait pas être une anomalie sur sa feuille de route, croit le robuste ailier. «J'obtenais cette année-là le même genre de temps de glace que cette année. Je sais que je peux marquer 15 buts en une saison. C'est un standard que je peux me fixer. Il n'y a pas de mal à viser haut.»

Bien que ça l'irrite de dire non, Brandon Prust n'est pas prêt à accepter toutes les invitations à jeter les gants. «Cette année, j'ai dû en refuser plus que jamais auparavant parce que je voulais nous prévenir des changements de momentum. On m'a souvent demandé de me battre parce que l'équipe gagnait beaucoup. Les batailleurs cherchent toujours une façon de faire tourner le vent de côté...»