Donald Trump a trébuché, Hillary Clinton a été accrochée: l'Iowa, première étape des primaires américaines dans la course à la Maison-Blanche, a été dur pour les favoris des sondages.

Appelés à choisir leur candidat pour l'élection du 8 novembre qui désignera le successeur de Barack Obama, républicains et démocrates se sont rendus en nombre dans les bureaux de vote (écoles, bibliothèques, gymnases...) de ce petit État agricole du Midwest.

Dans les deux camps, et dès la prochaine échéance du New Hampshire le 9 février, la lutte s'annonce âpre. L'ultra conservateur Ted Cruz vainqueur lundi côté républicain, tentera de capitaliser sur ce bon départ.

Du côté démocrate, le parti a confirmé la victoire de Hillary Clinton, mardi en début de journée avec une infime avance contre son rival Bernie Sanders au caucus démocrate dans l'Iowa, le plus serré jamais vu pour ce parti dans l'État américain.

«Je suis tellement heureuse de venir dans le New Hampshire après avoir gagné l'Iowa! Je peux vous le dire, j'ai gagné et j'ai perdu là-bas. Et c'est tellement mieux de gagner!», a déclaré Mme Clinton mardi en évoquant sa défaite dans l'Iowa en 2008 face à Barack Obama.

Avec la totalité des résultats recensés, l'ancienne secrétaire d'État a remporté 49,8% des votes lors des caucus organisés lundi soir dans ce petit État du centre, contre 49,6% pour le sénateur Bernie Sanders.

Le clan Clinton avait préalablement affirmé avoir gagné: «Hillary Clinton a remporté le caucus de l'Iowa. Après un comptage approfondi - et une analyse - des résultats, il n'y a pas de doute et la secrétaire Clinton a gagné le plus grand nombre de délégués nationaux et de l'État», a annoncé le directeur de campagne de la candidate pour l'Iowa, Matt Paul, dans un communiqué, avant l'annonce des résultats définitifs.Le chef du parti Andy McGuire a affirmé que l'ancienne secrétaire d'État avait obtenu 699,57 «équivalents de délégués» au terme d'un système de désignation très complexe dans le camp démocrate, contre 695,49 pour le sénateur du Vermont clairement ancré à gauche.

«Les résultats de cette nuit sont les plus serrés dans toute l'histoire du caucus démocrate de l'Iowa», a-t-il dit. Dans un discours au ton rassembleur, son mari Bill à ses côtés, l'ancienne First Lady a martelé que le parti démocrate représentait «ce qu'il y a de mieux pour l'Amérique» face à des candidats républicains qui cherchent à «diviser».

«C'est très important qu'une femme accède à la Maison-Blanche de mon vivant», expliquait Molly Schott, retraitée de 77 ans, venue écouter la candidate sur le campus de Drake University. «Ce soir, c'était la première étape. Le combat sera long».

«Révolution politique»

«Les habitants de l'Iowa ont envoyé un message au monde politique, au monde économique et aux médias», a de son côté lancé «Bernie».Dernier rival de l'ex-première dame encore en course pour l'investiture démocrate - l'ex-gouverneur du Maryland Martin O'Malley a annoncé lundi soir qu'il abandonnait, Bernie Sanders a souligné sa performance contre celle qui était au départ la grande favorite.

«Nous avons commencé notre campagne à 40, 50 points derrière» Hillary Clinton, a-t-il dit sur CNN mardi matin avant la publication des derniers résultats. «Que nous perdions par une fraction de point ou que nous gagnions, peu importe, nous sommes très fiers de notre campagne», a-t-il dit avant la fin du décompte, qui a pris toute la nuit et une bonne partie de la matinée.

«Ce que cela démontre, c'est que cette campagne a démarré d'une façon très vigoureuse, en partant de très, très loin derrière pour arriver à quasi-égalité», a ajouté le sénateur socialiste démocrate de 74 ans.

Le bouillant septuagénaire, pourfendeur de Wall Street, a une nouvelle fois appelé l'Amérique à une véritable «révolution politique».

Son discours révolutionnaire anti-élites a notamment séduit les jeunes, lui permettant de faire vaciller la position de grande favorite d'Hillary Clinton. La candidate a toutefois évité une redite de 2008, lorsque Barack Obama et John Edwards l'avaient battue dans l'Iowa.

Le prochain vote est prévu dans une semaine, le 9 février, dans le New Hampshire, terrain favorable pour Bernie Sanders, sénateur de l'État voisin du Vermont.

Mais la suite des primaires semble plus propice à Hillary Clinton. Onze États voteront le 1er mars pour répartir 21 % des délégués démocrates pour l'investiture. Or beaucoup se situent dans le Sud où l'électorat noir, acquis à la candidate, peut dépasser la moitié des votants.

Marco Rubio arrive troisième

Le très bon score de Marco Rubio, solide troisième chez les républicains selon des résultats partiels, devait faire pousser un «ouf» de soulagement aux ténors du «Grand Old Party».

«Pendant des mois, on nous a dit que je n'avais aucune chance, car je portais un message optimiste (...) ou que mes cheveux n'étaient pas gris», a immédiatement réagi, tout sourire, le sénateur de Floride au visage de jeune premier.

Lors de ces «caucus» (réunions) au format singulier, les républicains votent à bulletin secret, les démocrates forment des groupes par candidat afin de répartir des délégués.

«La procédure est assez confuse», constatait Aaron Menick, étudiant. «C'est très chaotique, mais je suis content que tant de gens se soient déplacés...», souriait-il.

Donald Trump a incontestablement passé une mauvaise soirée. Car le magnat de l'immobilier, trois fois marié, divise la droite religieuse, qui a aidé à couronner les deux derniers vainqueurs des «caucus» de l'Iowa en 2008 et 2012.

Beaucoup d'électeurs évangéliques ont en effet choisi le sénateur du Texas Ted Cruz, qui, selon les projections des télévisions américaines, est arrivé en tête avec environ 28% des voix dans cet État rural.

«Courageux conservateurs»

Créature du Tea Party, détesté au Congrès pour son obstruction permanente, le vainqueur du jour a fait campagne contre «le cartel de Washington».

«Ce soir est une victoire pour les courageux conservateurs, dans l'Iowa et à travers ce grand pays», a-t-il lancé, voyant dans ce résultat la preuve que le président des États-Unis ne serait  pas choisi par «les médias, les élites de Washington ou les lobbyistes».

Pour Trump, dont le discours anti-immigrés, anti-musulmans et «politiquement incorrect» lui a permis de faire un bond dans les sondages, l'équation se complique.

Celui qui étrille quotidiennement sur Twitter les «loosers» de tous poils sait qu'il va devoir faire évoluer sa posture après ce premier revers.

«Demain nous serons dans le New Hampshire (...) et nous nous battrons pour obtenir la nomination républicaine», a-t-il lancé dans un discours au ton inhabituellement posé et conciliant.

Grand perdant de la soirée, Jeb Bush, l'ancien gouverneur de Floride, fils et frère de président, termine très loin derrière.

Premières victimes de cette soirée électorale inaugurale: le démocrate Martin O'Malley, ancien gouverneur du Maryland et le républicain Mike Huckabee, ex-pasteur baptiste et ex-gouverneur de l'Arkansas, ont jeté l'éponge.

Le neurochirurgien Ben Carson, arrivé en quatrième position, a lui annoncé qu'il ne suspendait pas sa campagne après les primaires de l'Iowa, mais qu'il rentrait chez lui «chercher du linge propre».

PHOTO AP

Hillary Clinton était aux côtés de sa fille et de son mari pour livrer le dernier discours de sa soirée, à l'université Drake, à Des Moines.