Le Parti républicain doit se débarrasser de son image de mâles blancs, vieux, riches et rigides. De ce changement ne dépend rien de moins que le succès de son candidat présidentiel en 2016.

«Nous devons faire campagne parmi les Hispaniques, les Noirs, les Asiatiques et les gais pour leur montrer que nous nous intéressons aussi à eux», écrivaient les auteurs d'une autocritique publiée par le Comité national du Parti républicain après la sévère défaite subie par Mitt Romney lors de l'élection présidentielle de 2012.

Jeb Bush, ex-gouverneur de Floride et candidat potentiel à la présidence en 2016, avait été encore plus direct en déplorant l'image rétrograde et intolérante de son parti: «Beaucoup trop de gens croient que les républicains sont anti-immigrés, anti-femmes, anti-sciences, anti-gais, anti-ouvriers.»

Un message d'ouverture

Certains républicains ont reconnu la validité de cette autocritique. Au Sénat des États-Unis, ils se sont aussitôt attaqués au dossier le plus susceptible de redorer l'image de leur parti auprès de l'électorat hispanique. Et, la semaine dernière, 14 d'entre eux ont rejoint 52 démocrates et deux indépendants pour approuver une réforme de l'immigration qui ouvrira une voie vers la citoyenneté pour une bonne part des 11 millions de sans-papiers, en majorité mexicains, installés aux États-Unis.

«Je soutiens cette réforme non seulement parce que je crois en l'immigration, mais surtout parce que je crois encore plus en l'Amérique», a déclaré le sénateur républicain de Floride, Marco Rubio, autre candidat potentiel à la présidence en 2016.

Mais les républicains croient-ils encore en Marco Rubio? Après avoir appris que le sénateur avait reçu les félicitations de Barack Obama par téléphone, Sarah Palin l'a ni plus ni moins comparé à Judas. «J'espère que ça valait 30 pièces d'argent», a écrit l'ex-gouverneure de l'Alaska sur Twitter.

Le sentiment de trahison exprimé par Sarah Palin est largement répandu au sein des militants du Tea Party. Et il devrait influencer plusieurs républicains de la Chambre des représentants, où leur parti est majoritaire. Avant même le vote du Sénat, ceux-ci ont annoncé leur opposition à tout projet de loi pouvant mener à la naturalisation d'immigrés vivant aux États-Unis en situation illégale. Et ce, même si le processus menant à la citoyenneté devait prendre 13 années, comme le prévoit le texte adopté par le Sénat.

Bref, les républicains de la Chambre semblent être prêts à saborder la tentative de rapprochement de leur parti avec l'électorat hispanique. Mais ils n'en seraient pas à leur premier rejet d'une recommandation formulée par les auteurs de l'autocritique publiée en mars.

Au début du mois, les républicains de la Chambre ont adopté dans un vote purement symbolique un projet de loi limitant le droit à l'avortement aux 20 premières semaines après la conception. Ils n'ont pas amélioré leur image auprès des électrices modérées ou indépendantes en refusant, dans un premier temps, toute exemption pour les femmes qui tombent enceintes à la suite d'un viol ou d'inceste.

«Les cas de viol qui mènent à des grossesses sont très rares», a déclaré le représentant républicain d'Arizona Trent Franks, un des promoteurs du projet de loi, soulevant un tollé sur les réseaux sociaux.

Plusieurs républicains du Congrès se sont également repliés sur la position habituelle de leur parti contre le mariage homosexuel après les décisions de la Cour suprême la semaine dernière.

«Le mariage a été créé par la main de Dieu. Aucun homme, pas même une Cour suprême, ne peut défaire ce que le Dieu saint a institué», a déclaré la représentante républicaine du Minnesota Michele Bachmann.

John Boehner, président de la Chambre, a de son côté émis le souhait «que les États définiront le mariage comme l'union entre un homme et une femme».

Il venait ainsi de renouveler l'appui de son parti à une position qui est devenue minoritaire dans l'ensemble des États-Unis et qui le sera encore davantage avec les années.

Une intransigeance nuisible

Sur le plan strictement électoral, les républicains de la Chambre des représentants peuvent sans doute se permettre de s'accrocher à des positions datant d'une autre époque.

Ils représentent des circonscriptions conservatrices ou monochromes dont les contours ont parfois été ingénieusement tracés pour les mettre à l'abri des changements démographiques transformant leur État et leur pays.

Mais leur intransigeance continuera probablement à nuire à l'image de leur parti ainsi qu'aux chances de leur candidat présidentiel en 2016. Partisan de la réforme de l'immigration, le sénateur républicain de Caroline-du-Sud Lindsey Graham ne cache pas son inquiétude.

«Si nous n'adoptons pas la réforme de l'immigration, si nous ne réglons pas cette question d'une façon pratique et raisonnable, le choix de notre candidat présidentiel en 2016 n'aura aucune importance. Nous sommes dans une spirale de la mort démographique en tant que parti», a-t-il déclaré à quelques jours du vote au Sénat.