Le commissaire européen Michel Barnier a estimé mardi à Washington que les révélations sur le programme d'espionnage américain posaient la question de «confiance réciproque entre alliés» et souligné que l'Europe attendait des réponses de Washington, voire un changement de «méthodes».

«Cette affaire des écoutes et de l'espionnage pose la question de la confiance réciproque entre alliés (...) elle justifie qu'on se parle plutôt que le contraire, qu'on mette toutes les cartes sur table», a déclaré à la presse le commissaire européen chargé du Marché intérieur et des Services financiers, lors de sa visite dans la capitale américaine.

«C'est pour cette raison que nous avons ouvert avec les États membres (...) un groupe de haut niveau pour aller au fond des choses, savoir la vérité, obtenir des réponses claires et précises sur cette question de l'espionnage en particulier de nos institutions et nos citoyens», a-t-il ajouté.

Celui-ci a refusé de préciser si ces révélations allaient affecter les négociations entre l'Union européenne et les États-Unis sur un vaste accord de libre-échange (TTIP), entamées le 8 juillet à Washington.

Ces négociations ont démarré dans un climat assombri par l'affaire Edward Snowden, l'ex-consultant du renseignement américain recherché par Washington après avoir révélé au monde l'ampleur de l'espionnage mondial pratiqué par les services de renseignement des États-Unis. Les révélations sur l'espionnage de bureaux de l'UE par l'agence de sécurité nationale NSA ont rendu la situation électrique, Paris menaçant de suspendre «temporairement» les discussions sur le TTIP avant de se rallier à la solution prônée par Berlin de lancer les travaux sur l'accord commercial mais d'exiger en parallèle des «clarifications» de Washington.

«J'espère que les Américains ont bien compris que pour avoir toutes les conditions de cette confiance dont nous avons besoin pour réussir - notamment avec le TTIP - il faut que nous ayons vraiment des réponses, et peut-être faut-il qu'un certain nombre de méthodes cessent», a souligné le commissaire.

M. Barnier a également estimé que l'UE devrait «se donner les moyens de protéger les données de ses citoyens», défendant la proposition de la chancelière allemande Angela Merkel d'adopter une réglementation européenne en faveur de la protection des données.

«Les Européens ont maintenant cessé d'être naïfs», a relevé M. Barnier, confirmant que lors de son intervention dimanche à la prestigieuse Brookings Institution, il avait eu la surprise de recevoir un carton d'invitation avec en indication: «La NSA félicite à l'avance le commissaire Barnier pour ses remarques (car nous lisons tous ses mails)». «C'était de l'humour...», a-t-il dit.

M. Barnier est en visite depuis dimanche et jusqu'à mercredi à Washington, où il a notamment rencontré le secrétaire au Trésor Jack Lew.