Quand le plombier texan Mark Oberholtzer a vendu son vieux tacot en 2013, il ne s'attendait pas à le voir réapparaître sur un champ de bataille syrien... Menacé de mort par des internautes qui croient qu'il soutient les djihadistes, il poursuit aujourd'hui le concessionnaire Ford qui avait racheté sa camionnette.

C'était une banale histoire de revente de véhicule. Mark Oberholtzer, propriétaire de Mark-1 Plumbing, entreprise de plomberie de la ville de Texas City, a échangé son vieux F-250 chez un concessionnaire lors de l'achat d'un modèle plus récent, en octobre 2013.

Un an plus tard, le téléphone de M. Oberholtzer s'est mis à sonner jour et nuit. Des inconnus en colère aux quatre coins des États-Unis voulaient savoir pourquoi un Américain sympathisait avec les rebelles islamiques en Syrie, au point de leur envoyer une camionnette. Les menaces de mort ont commencé, et continuent régulièrement à ce jour.

«Comment ma camionnette s'est retrouvée en Syrie, je ne le saurai jamais, avait confié M. Oberholtzer au journal local à l'époque. Tout ce que je veux, c'est que cette histoire finisse.»

À la source de ce cauchemar: une image diffusée en décembre 2014 sur Facebook par le Front Ansar Dine, un groupe djihadiste actif près d'Alep, en Syrie. On y voit clairement la camionnette Ford F-250 de la société Mark-1 Plumbing, avec le numéro de téléphone de l'entreprise. Dans l'espace cargo de la camionnette se trouvait désormais une mitrailleuse antiaérienne manipulée par un homme à la cagoule noire.

Poursuite de 1 million

Cette semaine, M. Oberholtzer a déposé une poursuite de 1 million de dollars contre le concessionnaire AutoNation Ford Gulf Freeway qui a racheté sa camionnette. La poursuite note qu'au moment de conclure la transaction, en 2013, M. Oberholtzer a entrepris d'enlever les lettres autocollantes de la camionnette quand un employé du concessionnaire lui a demandé d'arrêter.

«[L'employé] lui a dit que cela pouvait endommager la peinture de la camionnette, lit-on dans le document. Il a ajouté que le concessionnaire avait des méthodes plus efficaces pour enlever les lettres autocollantes.» Croyant que cela serait fait, le plombier a donc laissé le lettrage intact.

En décembre dernier, la photo de la camionnette s'est propagée sur les réseaux sociaux, et les menaces ont commencé. L'intimidation était si virulente que des membres de la famille de M. Oberholtzer craignaient pour leur sécurité. Sa secrétaire a refusé de rentrer au travail. Le FBI a rencontré le plombier, et lui a suggéré de «se protéger». Depuis, il garde un revolver sur lui.

AutoNation et Mark-1 Plumbing n'ont pas rappelé La Presse, hier.

Mise aux enchères

Selon la poursuite, la camionnette a été mise aux enchères peu après qu'AutoNation en eut fait l'acquisition. C'est un vendeur texan de véhicules d'occasion qui l'a achetée. Le 18 décembre 2013, le véhicule a été exporté par bateau de Houston, au Texas, jusqu'à la ville de Mersin, en Turquie.

Ce n'est pas la première fois que les camionnettes utilisées par les djihadistes en Syrie et en Irak attirent l'attention. Cet automne, des officiels du contre-terrorisme américain ont demandé au géant japonais Toyota d'expliquer comment des djihadistes du groupe État islamique pouvaient mettre la main sur des centaines de camionnettes récentes produites par le constructeur. Toyota avait affirmé prendre la chose au sérieux, tout en ajoutant ne pas savoir comment les camions avaient été achetés par les terroristes.