La Corée du Nord est à nouveau capable de produire du plutonium dans le complexe nucléaire de Yongbyon et pourra en disposer dans quelques «semaines» ou «mois», selon le coordonnateur du renseignement américain, James Clapper.

«Nous estimons que la Corée du Nord a fait fonctionner son réacteur suffisamment longtemps pour pouvoir commencer à recueillir le plutonium d'ici quelques semaines ou mois», a-t-il expliqué dans son rapport annuel sur l'évaluation des menaces mondiales publié mardi.

Le rapport note aussi que «Pyongyang a décidé de développer un missile nucléaire à long rayon d'action capable de menacer directement les États-Unis», selon le rapport.

La Corée du Nord a montré publiquement ce missile, le KN08, mais il «n'a pas été testé en vol», souligne M. Clapper.

M. Clapper est le coordonnateur des 17 agences de renseignement américaines, dont la CIA, la NSA ou le DIA (renseignement militaire).

Il est le principal conseiller du président américain en matière de renseignement.

Washington sonne l'alarme

Régulièrement accusée de détourner les yeux de la menace nucléaire nord-coréenne, l'administration Obama sonne désormais l'alarme après la dernière initiative de Pyongyang, un lancement de fusée spatiale pouvant servir à tester des composants de missiles intercontinentaux.

Le président Obama a appelé son homologue sud-coréenne Park Geun-hye et le premier ministre japonais Shinzo Abe pour les assurer de sa solidarité après le lancement ce week-end de la fusée, et le quatrième test d'une bombe nucléaire mené par Pyongyang début janvier.

Les deux chefs d'État ont convenu «de faire en sorte que le Conseil de sécurité de l'ONU puisse adopter une résolution sur des sanctions fortes et efficaces», a expliqué la Maison-Bleue, la présidence sud-coréenne.

Les États-Unis prendront «toutes les mesures nécessaires» pour tenir leur engagement inébranlable de défendre la Corée du Sud et ses autres alliés dans la région, a indiqué de son côté la Maison-Blanche.

Ce tir, qui viole de multiples résolutions des Nations unies, a sonné comme un nouveau défi pour la communauté internationale qui peine déjà à sanctionner Pyongyang après son quatrième essai nucléaire du 6 janvier.

Présenté par Pyongyang comme une mission spatiale, ce lancer a été largement condamné comme un test de missile balistique déguisé, qui aurait en ligne de mire la mise au point d'armements capables de frapper le territoire américain.

Un projet de résolution sur de nouvelles sanctions rédigé par le Japon, la Corée du Sud et les États-Unis est débattu depuis le test nucléaire, mais la Chine, principale alliée de Pyongyang, traîne les pieds.

Pékin craint que des sanctions trop dures ne débouchent sur une instabilité qui pousserait un flot de réfugiés nord-coréen à franchir sa frontière.

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Une image-satellite du complexe nucléaire de Yongbyon, en août 2012.  

Batterie antimissiles

Elle ne peut non plus accepter qu'un éventuel effondrement du régime nord-coréen permette l'avènement d'une Corée réunifiée alignée sur les États-Unis juste à sa porte.

La Corée du Nord est déjà soumise à toute une panoplie de sanctions adoptées après ses trois précédents essais nucléaires, en 2006, 2009 et 2013.

Un rapport de l'ONU recommande de renforcer l'application de ces sanctions, à l'efficacité jusqu'à maintenant douteuse. Il suggère aussi d'ajouter les drones de reconnaissance et leurs composants à la liste des produits qu'il est interdit de fournir à la Corée du Nord.

Washington et Séoul ont déjà convenu, immédiatement après le tir de la fusée nord-coréenne, de déployer en Corée du Sud une batterie américaine antimissiles THAAD (Terminal High Altitude Area Defense), pour pouvoir intercepter un éventuel missile nord-coréen visant le voisin du sud. Une annonce militaire, mais qui est aussi destinée à faire pression sur la Chine pour qu'elle tape du poing sur la table face à son allié nord-coréen.

La Chine est en effet farouchement opposée au déploiement du THAAD, qu'elle considère comme une menace pour sa propre dissuasion nucléaire. Le radar très puissant de THAAD (Terminal High Altitude Area Defense) pourrait servir à surveiller ses propres tirs de missile.

Malgré les efforts déployés par Pyongyang, les experts estiment que le régime nord-coréen n'a toujours pas l'expertise nécessaire pour produire un missile balistique capable d'atteindre le territoire américain.

La fusée tirée ce week-end, qui transportait un satellite d'observation de la Terre, a atteint son orbite après 10 minutes de vol, selon la télévision officielle nord-coréenne. Sa portée est estimée à 12 000 kilomètres, contre 10 000 kilomètres pour le modèle précédent.