Soixante ans jour pour jour après la fin de la guerre de Corée, le régime nord-coréen a fait samedi une démonstration de sa puissance de feu et de la ferveur patriotique de son peuple en organisant une parade militaire grandiose.

Deux heures durant, des vagues de militaires marchant au pas de l'oie ont déferlé sur l'immense place Kim Il-Sung, au coeur de la capitale Pyongyang pavoisée aux couleurs nationales.

Le numéro un nord-coréen, Kim Jong-Un, a assisté aux côtés du vice-président chinois Li Yuanchao au passage des colonnes de chars et des missiles de portée diverse, montés sur des lanceurs géants, dans une chorégraphie censée témoigner de l'unité du peuple autour de son jeune chef.

Kim Jong-Un, en costume Mao de couleur sombre, a salué la parade depuis la tribune officielle surplombant la place noyée dans une mer de couleurs où des centaines de milliers d'hommes et de femmes agitaient drapeaux et fleurs rouges, roses, blanches et bleues.

L'arrivée de Kim a été célébrée par un feu d'artifice, un lâcher de ballons et les vivats de la foule.

D'autres types de missiles, des chars, des lance-roquettes multiples et des canons automoteurs ont suivi tandis que des avions de combat et des hélicoptères évoluant à basse altitude fendaient le ciel lourd de nuages.

L'arsenal exhibé incluait les missiles Musudan de moyenne portée, mais aussi ce qui semble être un missile à longue portée KN08. Les lanceurs de ce type présentés lors de précédents défilés ont été qualifiés de vulgaires copies par les experts étrangers.

Peu d'experts pensent que Pyongyang possède des engins intercontinentaux.

L'armistice du 27 juillet 1953 a mis fin à trois années de combats meurtriers qui ont dévasté la péninsule coréenne, scindée en un Nord communiste allié à Pékin et Moscou, et un Sud capitaliste allié à Washington.

En Corée du Nord, on fête «le jour de la victoire» dans la «guerre de libération de la patrie».

La parade concluait une semaine de festivités glorifiant le sacrifice des soldats pendant la guerre.

Dans un discours alternant le chaud et le froid, Choe Ryong-Hae, le plus haut gradé de l'armée nord-coréenne après Kim, a exalté pendant la parade «la supériorité d'esprit» des Nord-Coréens ayant permis selon lui de défaire l'ennemi américain.

Mais il a également déclaré que le Nord souhaitait voir s'installer «un environnement pacifique» à ses portes, indispensable à «la construction d'une économie forte et à l'amélioration des conditions de vie de la population».

Sur la place, une photo géante du défunt Kim Il-Sung, fondateur de la République Populaire Démocratique de Corée (RPDC), est passée derrière la tribune. Son visage présentait des traits si semblables à ceux de Kim Jong-Un que certains observateurs soupçonnent le portrait d'avoir été numériquement retouché pour que le prestige dont jouit le grand-père, héros de la nation, rejaillisse sur son petit-fils.

Les observateurs étrangers qui attendaient un discours de Kim Jong-Un en ont été pour leurs frais.

Les 60 ans de l'armistice interviennent au moment où les deux Corées tentent d'apaiser durablement les tensions surgies après un tir réussi de fusée - considéré par Séoul comme un essai de missile intercontinental -, un nouvel essai nucléaire, et des menaces répétées de frappes contre ses ennemis.

À l'acmé de ces tensions, le Nord avait annoncé en mars la rupture unilatérale de l'armistice signé sous l'égide des Nations unies, et ne se sentait plus lié par lui.

La présence du vice-président chinois était significative compte tenu du récent agacement de Pékin face aux rodomontades de son voisin pour lequel la Chine a sacrifié des centaines de milliers de soldats entre 1950 et 1953.

Le nouveau président chinois Xi Jinping a adopté un ton inhabituellement dur, sans directement nommer la Corée du Nord, en déclarant en avril n'avoir aucune tolérance pour ceux «qui provoquent le chaos à des fins égoïstes».

Pour sa part, le président américain Barack Obama a estimé à Washington que l'armistice avait été une «victoire» pour les États-Unis.

«Quand 50 millions de Sud-coréens vivent libres, dans une vibrante démocratie, une des économies les plus dynamiques, il y a un violent contraste avec la répression et la pauvreté qui sévissent au nord. C'est une victoire, c'est notre héritage», a-t-il déclaré.

À Séoul, la présidente Park Geun-Hye a renouvelé son appel à la Corée du Nord à renoncer à ses ambitions nucléaires.

«Si le Nord fait le bon choix, nous développerons nos échanges et notre coopération et ouvrirons la voie de la prospérité du Nord et du Sud», a-t-elle dit.