Un Uruguayen miraculé des Andes, prisonnier de la neige pendant quatre mois et retrouvé dimanche, était sur le point de devenir un héros avant qu'il ne soit rattrapé par des accusations de pédophilie.

Découvert dimanche, amaigri et affaibli, dans le refuge argentin de Sardina Mountain à environ 4500 mètres d'altitude dans la vallée de Los Patos, aux confins de l'Argentine et du Chili, Raul Gomez Cincunegui, 58 ans, a fait l'objet lundi d'une demande d'extradition de la part du Chili, accusé d'abus sexuel sur un enfant de huit ans.

«Il se remet bien. Il est lucide et il a bon moral. Il était dans un état de déshydratation aiguë. Sa famille vient de lui rendre visite dans l'unité de soins intensifs», a dit lundi à l'AFP Rodrigo Belert, porte-parole de l'hôpital Rawson de San Juan en Argentine, où il a été admis la veille.

Il ne pesait qu'un peu plus de 40 kg quand les sauveteurs l'ont pris en charge.

Aussitôt après avoir été retrouvé dans le refuge, l'Uruguayen avait été transféré en hélicoptère dans la ville de San Juan, dans l'ouest de l'Argentine, non loin de la frontière avec le Chili.

Les autorités locales ont diffusé des images montrant les secouristes portant le motard perdu entre le refuge et l'hélicoptère, puis sur son lit d'hôpital, entouré de sa femme et de sa fille qui le croyaient mort.

Des pilotes d'hélicoptères en mission dans les Andes l'ont découvert par hasard, assis à proximité d'un refuge. M. Gomez a survécu en se nourrissant de morceaux de sucre et de raisins secs qu'il avait sur lui, et aussi de nourriture trouvée dans des refuges de montagne, selon la police.

«C'est un miracle», a déclaré le gouverneur de la province de San Juan, Jose Luis Gioja.

«Ils l'ont trouvé, assis, il présentait des signes de déshydratation et malnutrition» et il avait perdu toute notion du temps qui s'était écoulé depuis sa panne de moto, selon le gouverneur.

«Je ne peux pas le croire. Il est venu ici et a parlé au téléphone avec sa femme, sa mère et sa fille. Il était très heureux, quoique fatigué», a encore souligné M. Gioja.

Du miracle au fait divers sordide

Mais le miracle a rapidement tourné au fait divers sordide, quand il s'est avéré que le rescapé était en réalité en fuite, accusé d'abus sexuel sur un enfant de huit dans les environs de Santiago du Chili, selon le parquet local.

«Il a quitté le territoire national alors qu'il lui était interdit de sortir du pays» depuis le 22 avril, a expliqué à l'AFP le procureur Luis Cortez.

M. Gomez était porté disparu depuis mai alors qu'il effectuait un voyage à moto au départ de l'Uruguay. Après s'être rendu à Mendoza (nord-ouest de l'Argentine) pour une rencontre de motards, il avait poursuivi son périple vers le Chili.

Puis, après les faits qui lui sont reprochés, il avait repris la direction de l'Argentine. Toutefois, après une panne de moto, il avait décidé de poursuivre sa route à pied, avant de s'égarer, en raison des chutes de neige en plein hiver austral, à 4000 mètres d'altitude, d'après son récit aux secouristes.

Les recherches pour le retrouver avaient été arrêtées en juillet en raison de tempêtes de neige.

Cette aventure andine renvoie à une tragédie aérienne survenue en octobre 1972, quand un avion qui conduisait au Chili les membres de l'équipe de rugby des anciens étudiants du collège Stella Maris de Montevideo s'était écrasé dans les Andes, à 3500 mètres d'altitude.

L'accident avait fait 29 morts et 16 Uruguayens avaient été secourus 72 jours plus tard après avoir survécu en mangeant de la chair humaine.

Originaire de la ville uruguayenne de Bella Union, M. Gomez, qui avait eu des problèmes cardiaques et respiratoires, s'était aventuré à traverser les Andes à moto en mai, alors que les passages frontaliers étaient fermés depuis le 30 avril.