Les déchirements des héritiers de Nelson Mandela, qui n'hésitent plus à régler leurs comptes en direct à la télévision, ne sont que le dernier épisode d'une série de frasques de la plus célèbre famille d'Afrique du Sud.

Alors que le héros de la lutte anti-apartheid et premier président noir du pays se trouve entre la vie et la mort dans un hôpital de Pretoria, l'aîné de ses petits-fils Mandla s'est lâché jeudi lors d'une conférence de presse surréaliste, réglant ses comptes avec une bonne partie de ses parents.

Étalant les secrets d'alcôve de la famille, il a même accusé son frère Mbuzo d'avoir «fécondé» sa propre épouse, une Réunionnaise. Mbuzo fait partie des quinze membres de la famille qui ont saisi la justice pour le forcer - avec succès - à rendre les dépouilles de trois enfants de Nelson Mandela morts en 1948, 1969 et 2005.

Les corps avaient initialement été enterrés dans le village de Qunu (sud), où Nelson Mandela a passé les plus belles années de son enfance et où il souhaite reposer au milieu des siens. Mais Mandla les a transférés en 2011 vers le village natal de son grand-père, Mvezo, à une trentaine de kilomètres. Chef traditionnel de cette localité, il y porte un projet grandiose de site touristique avec un mémorial à la gloire de son aïeul.

«Je me suis retrouvé attaqué par des individus qui cherchent une minute de gloire et d'attention médiatique à mes dépens», a-t-il déclaré. Tout en se défendant de vouloir «laver son linge sale en public», il s'en est pris nommément à plusieurs d'entre eux.

Sa tante Makaziwe: «Au lieu d'être une force d'unité, elle n'a fait que semer la division dans la famille.»

Son demi-frère Ndaba: «Il sait que mon père a mis enceinte une femme mariée et qu'il est le résultat de cet acte.»

Son autre frère Mbuzo: «Il a fécondé ma propre femme» (la Réunionnaise Anaïs Grimaud, repartie depuis sur son île).

À en juger par les premières réactions sur Twitter, les Sud-Africains ont peu goûté ce déballage en public: «Heureusement que le legs politique de Mandela est trop fort pour être détruit», «on ne choisit pas sa famille», «Un Mandela peut-être, mais un Nelson, je ne crois pas...», pouvait-on lire sur le site de microblogues.

«Mandla est devenu le JR Ewing de la famille Mandela», ironisait avant même ces dernières révélations l'éditorialiste du site Daily Maverick, en référence à l'anti-héros de la série américaine Dallas.

Mandla, 39 ans, avait déjà défrayé la chronique en raison de ses démêlés conjugaux ou avec ses voisins. Élu député depuis 2009, sous l'étiquette de l'ANC, le mouvement pour lequel a lutté son grand-père, il n'a en revanche pas brillé par ses prises de position politiques.

Téléréalité, tee-shirts et vin

Autre Mandela au Parlement : l'ex-épouse du héros national, Winnie Madikizela-Mandela, a également eu maille à partir avec la justice pour des exactions commises par ses gardes du corps dans les années 1980, puis pour fraude en 2003.

Le reste de la famille, qui compte trois filles, dix-sept petits-enfants et douze arrière-petits-enfants, avait d'abord construit sa vie loin de la politique et des médias. Mais depuis la dernière apparition publique de leur patriarche, en 2010, certains ont pris des libertés avec ses consignes.

Alors que Nelson Mandela a toujours strictement contrôlé l'utilisation commerciale de son nom en la limitant à des fins caritatives, quatre de ses petits-enfants ont créé la marque de vêtement LWTF Clothing. L'acronyme fait référence à l'autobiographie du grand homme Long Walk to Freedom (Un long chemin vers la liberté) et leurs tee-shirts n'hésitent pas à afficher son portrait ou sa signature.

Plus récemment, c'est Makaziwe, l'aînée de ses enfants, qui s'est lancée dans les affaires, en commercialisant des vins sous l'étiquette House of Mandela avec sa fille Tukwini.

Également en décalage avec l'image du Nobel de la paix, deux de ses petites-filles ont participé récemment à une émission de téléréalité, intitulée Being a Mandela, dans laquelle elles évoquent leurs histoires de femmes bien nées.

D'autres n'ont pas apprécié que sa fille Zenani soit nommée ambassadrice en Argentine alors qu'elle n'a aucune expérience dans la diplomatie.

Moins anecdotique, Zenani et sa demi-soeur Makaziwe ont récemment intenté une action en justice pour obtenir l'éviction de trois proches de leur père de la direction de fonds d'investissement qui gère la fortune familiale.

Les deux femmes accusent notamment la vedette du barreau George Bizos - un ami qui a défendu Mandela sous l'apartheid - d'être entré en force, avec deux autres proches de Mandela, dans les affaires de la famille.

Les trois hommes mis en cause ont rappelé à la Cour que Mandela «ne voulait pas qu'elles se mêlent de ses affaires».

En jeu : environ 1,7 million de dollars accumulés par l'icône mondiale du pardon grâce à la vente de son autobiographie, d'oeuvres d'art avec l'empreinte de sa main ou son matricule de prisonnier 46664.