Une étude du gouvernement américain selon laquelle la fracturation hydraulique n'a pas d'impact majeur sur les ressources en eau potable a été accueillie avec enthousiasme par le lobby qui représente cette industrie au Québec. Mais pour les écologistes, le rapport préliminaire ne prouve en rien que les forages sont sans risque pour l'environnement.

L'Environmental Protection Agency (EPA) a été chargée par le Congrès en 2010 de vérifier si l'extraction de pétrole ou de gaz de schiste pouvait entraîner une contamination des eaux. Dans un rapport préliminaire publié hier, l'agence conclut que la technique utilisée par cette industrie, la fracturation hydraulique, « n'entraîne pas d'impact étendu, général, sur les ressources en eau potable aux États-Unis ».

L'agence relève cependant plusieurs cas où des forages pétroliers ou gaziers ont entraîné la contamination de sources d'eau. Dans certains cas, des failles dans la conception ou la construction du coffrage de ciment des puits ont entraîné les fuites de produits chimiques ou d'hydrocarbures dans la nappe phréatique.

« Le nombre de cas, par contre, était petit en comparaison du nombre total de puits de fracturation hydraulique », peut-on lire dans le document.

Le site Inside Climate News, citant une demi-douzaine d'anciens employés de l'EPA, des sources politiques et plus de 200 pages de correspondance officielle, a rapporté en mars que l'étude de l'agence avait été minée par le manque de coopération de l'industrie pétrolière et gazière.

L'EPA reconnaît d'ailleurs qu'elle n'est pas en mesure d'établir le nombre de fuites dans la grande majorité des États producteurs. Elle ajoute qu'elle dispose de données « insuffisantes » sur les sources d'eau avant et après les forages.

Ses conclusions peuvent donc « refléter une rareté des effets sur les ressources d'eau potable, ou une sous-estimation causée par plusieurs facteurs », affirme l'agence.

Le rapport est reçu avec enthousiasme par l'Association pétrolière et gazière du Québec, qui y voit une preuve que la fracturation hydraulique peut être entreprise de manière sécuritaire pour l'environnement.

« Nous saluons la rigueur et l'ampleur du travail effectué par l'EPA, a indiqué le porte-parole de l'APGQ, David Lefebvre. La question de la contamination de l'eau est souvent revenue dans le débat sur la fracturation, au Québec comme ailleurs, et nous sommes contents que cette étude fasse la lumière sur le sujet. »

Mais aux yeux du porte-parole de Greenpeace, Patrick Bonin, les conclusions de l'EPA n'ont rien de rassurant pour les Québécois.

« C'est évident qu'il y a des risques de contamination de l'eau potable associés à la fracturation hydraulique, a-t-il noté. Ça revient à dire que si on laisse aller les gazières au Québec, les gens vont jouer à la roulette russe avec leur eau potable. »

M. Bonin rappelle que l'industrie gazière a provoqué une levée de boucliers dans des régions du Québec. Il souligne que l'extraction de gaz de schiste pollue l'air et que les émissions fugitives de méthane ont un puissant effet de serre.

La Presse a révélé en 2011 que sur 31 puits inspectés par le ministère des Ressources naturelles, 19 laissaient échapper des émanations de gaz naturel.

Le développement du gaz de schiste est sur la glace au Québec, et le potentiel pétrolier de l'île d'Anticosti fait toujours l'objet d'un examen. Le gouvernement Couillard a lancé l'an dernier deux études environnementales stratégiques (EES), l'une sur l'ensemble de la filière des hydrocarbures, l'autre spécifiquement sur Anticosti.