La tragédie de Lac-Mégantic n'est pas sans rappeler le funeste événement du 1er janvier 1980, alors que Chapais célèbre le Nouvel An. Au milieu des réjouissances, le feu embrase la salle communautaire, lieu de rencontres et de célébrations. 48 personnes y trouvent la mort et une cinquante d'autres sont blessées, marquées au fer pour la vie. Sans compter un fils, une fille privés d'une mère, d'un père; de parents qui pleurent un enfant; de familles décimées; d'amis perdus.

Dans une communauté isolée dans le nord, d'environ 2500 habitants, tout le monde connait tout le monde. L'épreuve n'en est que plus douloureuse. J'y ai laissé petite amie et demi-soeur, que nous avons pu identifier grâce aux bijoux. Lac-Mégantic survit à ses morts aujourd'hui. Combien? Peut-être autant, sinon plus qu'à Chapais. 

Le plus effarant dans ces catastrophes, ce n'est pas un acte de Dieu, c'est la raison humaine. Ou plutôt la déraison. L'hommerie dans son expression la plus bête et stupide. L'un met le feu délibérément, pour s'amuser, à une couronne de sapinage entourant la sortie principale de la salle communautaire, emprisonnant les villageois qui dansent et célèbrent. L'autre laisse un train fou dévaler au milieu d'une commune endormie. Erreur humaine? Conducteur négligent? Cheminot distrait? Consignes confuses? Nous le saurons assez vite.

Chapais a tourné la page, trois décennies plus tard, mais l'écriture reste. Le livre ne sera jamais fermé. Oui à la résilience. Bravo à l'entraide et la solidarité. Mais il n'y aura jamais plus de célébrations collectives du Nouvel An à Chapais. Espérons que le coeur de Lac-Mégantic continuera de battre et que son centre-ville ne sera pas une extension de son cimetière.