Les proches des disparus de Lac-Mégantic devront trouver de grandes ressources en eux pour pouvoir faire leur deuil, car les délais requis par les enquêtes qui s'amorcent freineront ce processus naturel.

Vendredi encore, ils faisaient partie de leur vie. Depuis, c'est comme s'ils s'étaient volatilisés. Dans la très grande majorité, voire la totalité des cas, l'identification visuelle des victimes sera impossible, confirme le Bureau du coroner.

Voir l'être aimé une dernière fois et prendre ainsi contact avec la réalité de sa disparition est un moment difficile, mais indispensable pour beaucoup de gens. Ce n'est pas pour rien qu'on expose les défunts. De cette étape, déjà, les survivants de Lac-Mégantic doivent faire leur deuil. Au lieu de cela, on leur demande des fiches dentaires, des brosses à dents ou d'autres sources d'ADN qui aideraient à l'identification. Le conditionnel n'est pas innocent: il possible qu'on ne retrouve aucune trace de certaines des personnes manquant à l'appel.

Le Bureau du coroner ne veut pas donner d'échéancier, mais vu la complexité de la tâche, il mettra du temps à fournir toutes les réponses. On nous dit que pour l'instant, les ressources internes suffisent. La tragédie, toutefois, génère un volume de cas exceptionnel. Les autorités parlaient hier de 50 personnes, une dizaine de plus que la veille. Les politiciens ont été nombreux à se précipiter au chevet de Lac-Mégantic. Ils doivent maintenant s'assurer que les coroners aient toutes les ressources dont ils ont besoin pour procéder aussi rapidement que possible.

L'attente se prolongera cependant sur un autre front, celui de la recherche des causes du sinistre. Devant une catastrophe naturelle, on finit par se faire une raison et accepter l'expression de forces plus grandes que soi. Rien de tel ici, puisque tout porte à croire que des facteurs humains sont en cause. Tant que les circonstances ne seront pas éclaircies, les proches pourront difficilement être en paix.

Ils devront se montrer patients, car une enquête comme celle du Bureau de la sécurité des transports (BST) prend beaucoup de temps. Les rapports sur les accidents ferroviaires sortent généralement plus d'un an après les faits. Et la visibilité de l'épisode n'accélère en rien le processus, au contraire. Le déraillement qui a provoqué un déversement de près de 900 000 litres de mazout et d'huile près du Lac Wabamun, en Alberta, a fait scandale en 2005. Pourtant, le BSP a mis plus de deux ans à publier son rapport.

Le travail de reconstruction matérielle et morale qui attend les quelque 6000 habitants de Lac-Mégantic est gigantesque. Espérons que tous ceux qui manifestent aujourd'hui leur soutien montreront autant d'empressement à les aider quand les caméras seront reparties.

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