Il fut une époque, dans le temps où il y avait seulement 174 sortes de yogourts, où l'on pouvait se contenter d'être ministre des Transports.

Sauf que « transports »... c'est vague ! Quels transports, au juste ?

Excellente question à laquelle le gouvernement répond en améliorant le nom franchement chenu de ce ministère.

Désormais, M. Jacques Daoust est ministre « des Transports, de la Mobilité durable et de l'Électrification des transports ».

On pourrait croire que la mobilité durable, c'était déjà inclus. Eh non. Les Transports, ce n'était que la mobilité non durable.

De nos jours, un nom de ministère doit évoquer autre chose que la simple gestion d'un secteur d'activité. Il faut que le titre annonce un projet.

Transports, c'est beige. Ça sent le vieil asphalte et les ponts rouillés. Mais... la mobilité durable ! Oh ! Ça fait rêver ! J'en veux !

Chaque époque a ses marottes. Où est passé le ministère de l'Habitation et de la Protection des consommateurs ? Un grand truc, ça, la protection du consommateur, dans les années 70. Disparu en 1984...

On avait joint aux sympathiques consommateurs la « Coopération et les Institutions financières », en 1975. C'était le temps des caisses d'économie, le temps où Desjardins ne voulait pas être une banque...

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On n'est plus seulement ministre de l'Environnement, mais aussi, depuis 2014, « du Développement durable et de la Lutte contre les changements climatiques ».

C'est donc dire qu'avant, le ministre de l'Environnement n'avait rien à cirer des changements climatiques ? Y peut ben faire chaud ! Merci, merci d'y avoir pensé, même si c'est un peu tard...

L'Environnement est une invention récente. Avant, il y avait des Terres et Forêts. En 1979, quand on l'a créé, c'était le ministère « de l'Environnement et de la Faune ». Enfin, quelqu'un pensait aux ratons laveurs. L'environnement sans animaux, c'est triste.

La ministre de l'Emploi s'est vue chargée aussi de la Solidarité en 1997. Euh... Solidarité avec qui ? Les gens étaient mêlés. Pour plus de clarté, en 2001 c'est devenu le ministère de l'Emploi et de la « Solidarité sociale ». Ah ! Celle-là !

Parlant de solidarité, le gouvernement trouve toujours de nouvelles manières de s'occuper des régions. Il y a eu le Développement régional. Le Développement économique ET régional. Ça n'a pas dû marcher, on a fait le ministère des Régions tout court - d'un côté, c'est comme si on renonçait au développement, mais de l'autre, c'est une reconnaissance qu'elles ont autre chose à faire que de se développer.

Lucie Charlebois est ministre déléguée à la Réadaptation, à la Protection de la jeunesse, à la Santé publique... mais aussi aux Saines habitudes de vie. Ça n'entrait ni dans l'Éducation ni dans la Santé tout court, apparemment. À quand un ministre délégué à la Bienséance et au Savoir-Vivre ?

En 2005, on a ajouté au Développement économique l'Innovation et les Exportations. Comment développer sans innover ? Et après, quoi faire avec ? L'exporter, bien entendu. Logique.

Un temps, on a eu un ministre « des Affaires municipales, des Régions et de l'Occupation du territoire ».

Vous croyez peut-être que l'Occupation du territoire, c'est un peu inclus dans les Régions ? Pas du tout. La preuve, Martin Coiteux hérite, en plus de la Sécurité publique, des Affaires municipales et de l'Occupation du territoire... Tandis que Lise Thériault, à part les Petites et Moyennes Entreprises et l'Allègement réglementaire, se voit confier le « Développement économique régional ».

D'ailleurs, il n'y a plus de ministre des Régions, mais chaque région a son ministre.

Vous serez peut-être étonné d'apprendre que le ministère de la Colonisation a duré jusqu'en 1973.

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On n'a jamais trop su où fourguer la Chasse et ce qu'on a longtemps appelé « les Pêcheries ». Ce fut tantôt avec la Colonisation. Tantôt avec les Mines. Puis les Travaux publics. Ah ! 1941 : Chasse et Pêche tout court. Mais 1958 : Pêcheries et Chasse.

Puis Loisirs, Chasse et Pêche. Après quoi ce furent les Loisirs, Chasse et Plein-Air. Eh oui, la chasse, c'est dehors. Enfin, Éducation, Loisir et Sports. La chasse serait donc un loisir ?

N'empêche. Vous êtes un raton laveur, ce matin. Qui est votre ministre ?

Vous êtes un loisir pour le chasseur, un truc assez environnemental pour le naturaliste, une ressource naturelle pour le trappeur et un objet touristique pour des Français qui veulent un chapeau.

Je crois qu'il manque un ministre des Ratons laveurs.