A-t-elle quelque chose à dire? C'est la question que je me suis posée hier, au terme de la conférence de presse de Sofia Coppola à Cannes pour The Bling Ring, qui ouvrait la section Un certain regard. La réponse n'est pas claire...

La cinéaste de Lost in Translation et de Somewhere, Lion d'or à Venise en 2010, creuse davantage le sillon de la célébrité dans ce long métrage de fiction inspiré de faits réels, qui doit prendre l'affiche le 21 juin au Québec.

The Bling Ring s'intéresse à une bande de cambrioleurs adolescents de Los Angeles obsédés par les vedettes hollywoodiennes et leurs vêtements griffés. C'est en lisant un reportage du magazine Vanity Fair intitulé Les suspects portaient des Louboutin que Sofia Coppola a eu l'idée de raconter leur histoire au cinéma.

L'histoire de quatre filles et de leur ami gai qui se sont introduits par effraction, il y a cinq ans, dans plusieurs maisons de vedettes, en guettant leurs déplacements sur internet. Lindsay Lohan, Paris Hilton et Megan Fox ont entre autres fait les frais de ces séances de «magasinage» illicite. Avant d'être arrêtée, la gang du Bling Ring avait dérobé quelque 3 millions de dollars en bijoux, vêtements et chaussures de luxe.

Le comble de ce récit de soirées de vols spontanés, pimentées à la vodka et à la cocaïne: deux des délinquantes, les soeurs Neiers, ont fini par devenir elles-mêmes des vedettes de téléréalité. La preuve par l'absurde que la célébrité est une maladie contagieuse, «une fascination perverse de l'Amérique», comme le dit l'un des personnages du film.

Sofia Coppola pose un regard ironique sur la vacuité de ces jeunes narcissiques, qui affichent sans cesse des photos d'eux-mêmes sur Facebook. On sourit en voyant la véritable maison de Paris Hilton servir de décor. Une maison ridiculement kitsch où l'on trouve une multitude de coussins et de tableaux à l'effigie de la blonde héritière.

The Bling Ring propose une ambiance pop acidulée qui n'est pas désagréable, à la manière de Marie Antoinette, avec des musiques de M.I.A. et de Kanye West, notamment. Mais c'est un film qui manque cruellement de liant, ce que n'aide en rien le jeu bancal des acteurs (à l'exception d'Emma Watson). Le scénario finit par tourner à vide et l'on sort de la salle en se demandant ce que Sofia Coppola pense réellement de cet épisode.

J'espérais en découvrir davantage dans la foulée de la projection, à la conférence de presse. C'était sans compter sur le fait que Sofia Coppola est aussi loquace qu'un joueur de hockey après une élimination des séries. On peut mettre cela, sans doute en partie, sur le compte de la timidité et d'une méfiance, compréhensible à l'égard des médias. Il reste que la cinéaste n'a rien voulu dire de plus que des banalités sur le culte de la célébrité.

«C'est un monde d'excès», «c'est un phénomène de plus en plus présent que je trouvais intéressant comme sujet de film», s'est-elle contentée de répéter, en éludant toutes les questions traitant de son point de vue moral sur ces jeunes obnubilés par la célébrité. Mais encore?

Il y avait pourtant là matière à une réflexion riche - les impacts sociaux de la téléréalité, les dérives du matérialisme, la célébrité comme nouvelle forme de religion - que la cinéaste, malheureusement, n'arrive pas à exploiter de manière convaincante. Ni en personne ni dans son film.

Le gratin cannois

Tout le gratin cannois était sur place au dîner d'ouverture du festival mercredi: les vedettes du film d'ouverture, The Great Gatsby, les membres du jury, l'état-major du festival, les grosses légumes de Hollywood. Je n'ai malheureusement pas eu l'occasion de discuter avec Nicole Kidman, Steven Spielberg ou Leonardo DiCaprio. Je m'en excuse auprès d'eux. L'interprète de Gatsby avait l'air de s'ennuyer ferme après la réception tiède réservée à son film au grand théâtre Lumière.

Je n'ai pas non plus eu le temps de saluer Chloé Robichaud, présente grâce à la sélection de son premier long métrage, Sarah préfère la course, dans la section Un certain regard (où il sera présenté mardi). J'étais trop occupé à me désoler de la disparition tragique du récit de Fitzgerald dans l'oeuvre de Baz Luhrmann avec des collègues français et italiens, laissant seule la critique du New York Times à défendre la vision de l'Australien.

J'avais surtout à coeur de saucer mon pain dans un délicieux plat de lotte conçu par la chef étoilée Anne-Sophie Pic. La vie mondaine a quelques avantages. «Ce n'est absolument pas poli, mais je vais faire comme vous, c'est trop bon», m'a confié, en s'excusant de ses manières, ma très sympathique voisine de table. Ah, ces rustres Canadiens!

En partant, sous la pluie battante, je me suis fait damer le pion devant deux taxis par les membres du jury Christoph Waltz et Daniel Auteuil, que je venais justement de traiter de nains dans ma chronique. Mauvais karma.

Pilote sur la Croisette

J'ai croisé par hasard Sébastien Pilote, à son arrivée à Cannes hier. Le cinéaste du Vendeur combattait le décalage horaire. Il sera fin prêt, aujourd'hui, pour la présentation de son deuxième long métrage, Le démantèlement, à la Semaine de la critique. Son noeud papillon est prêt et l'équipe de chez Dubuc a procédé mercredi aux dernières retouches à son costume noir. «Avec de la chance, il va aussi pouvoir me servir aux Jutra!», m'a confié Pilote.

Entendu

«Ça fait du bien de pouvoir improviser des dialogues après avoir été contrainte à répéter des phrases que tout le monde connaît!» - Emma Watson, à propos de The Bling Ring de Sofia Coppola... et de son rôle d'Hermione dans Harry Potter.

Vu

David Hasselhof sur le tapis rouge du Palais des festivals. Oui, oui, le gars de K-2000 et d'Alerte à Malibu. Quand Cannes accueille les stars de série B...