Ce ne fut pas une soirée assommante ni flamboyante. Ce ne fut pas un gala catastrophique ni fantastique. Ce fut une cérémonie correcte, sans vague d'émotion, sans frisson.

Il a fallu patienter jusqu'à la toute fin de cette fête de trois heures pour entrevoir le meilleur de René Simard, soit la parodie Les Simard-Taillefer, un court film tourné avec une rafraîchissante dose d'autodérision. Marie-Josée Taillefer y a même sacré, imaginez. On en aurait pris davantage.

Parlant de Marie-Josée Taillefer, la femme du maître de cérémonie, c'est d'elle qu'est venue la seule et unique sortie contre la Charte des valeurs québécoises. La caméra a tout de suite montré le visage peu souriant de Pauline Marois, qui n'a pas eu l'air de s'amuser du tout.

Comme animateur, René Simard a imposé un style chanté à la Neil Patrick Harris. On l'a très peu vu. Il a beaucoup souri et a été très enthousiaste. Trop, peut-être. Ses interventions manquaient un peu de croquant. En même temps, son jovialisme tranchait avec le cynisme et la "bitcherie" qui inondent les médias, traditionnels comme sociaux.

Visuellement, le numéro d'ouverture à la Broadway a été fort joli avec ses projections extérieures sur les édifices du Quartier des spectacles. Les paroles de la chanson accompagnatrice, où René Simard confessait son amour infini pour le petit écran, ne cassaient pas la baraque. Et une mauvaise sonorité nous empêchait de bien entendre toutes les répliques.

Les idées de mise en scène ont ensuite navigué dans des eaux houleuses. Le sketch sur le croisement d'émissions, comme À la di Stasio et L'amour est dans le pré, a bien démarré, mais s'est conclu sur une note discordante: le psychologue d'En thérapie (François Papineau) s'est pendu devant les filles de La galère. Malaise.

Les vignettes sur les auteurs de comédie, qui interagissaient avec leurs personnages, ont été divertissantes. Une chanson de trois minutes sur le plan-séquence? D'accord. Une belle prouesse technique, exécutée sans faute par un René Simard essoufflé, mais qui avait peu à voir avec une remise de prix. Je passe, tel un dragon.

Mention spéciale à Anne-Marie Dussault et son double, Marie-Anne Du-Saut (jouée par Martin Proulx, des capsules web Jeudi 16h), qui ont été vraiment drôles, même si trop longues au micro.

L'hommage à Unité 9 était mérité, personne ne contestera ça. Mais ce segment détonnait, car aucune des actrices sur la scène n'avait été inscrite au concours. En plus, quand Guylaine Tremblay et ses détenues ont été ovationnées, le vote du public - qu'elles ont remporté - n'était pas encore terminé sur le web. Un coup de pouce supplémentaire (et publicitaire?) que les autres finalistes n'ont pas eu.

Parenthèse: si OuiSurf d'Évasion a terminé dans les cinq émissions les plus "populaires" du 28e gala des Gémeaux, c'est tout simplement parce que leurs fans se sont mobilisés sur les réseaux sociaux. Comme dirait l'autre, ils ont paqueté le vote.

Dans la répartition des statuettes, le nom Claude Legault a, comme prévu, résonné plusieurs fois à la Place des Arts. Son rôle tout en nuances dans la comédie Un sur deux de TVA (le bon gars Michel) a été remarqué par l'Académie.

C'est un très beau personnage que lui ont écrit les auteurs d'Un sur deux, Daniel Chiasson et Donald Bouthillette: moderne, attachant et faillible. Notez que MM. Chiasson et Bouthillette, bien rigolos sur la scène, ont écarté du podium la brillante scénariste de Mauvais karma, Isabelle Langlois, qui gagne presque toujours pour ses textes en comédie. Tout un exploit de leur part.

Autre petite surprise ici, ce n'est pas pour le flic Ben Chartier que Claude Legault a triomphé en dramatique hier, mais bien pour le tétraplégique Alex qu'il a incarné dans la minisérie Mon meilleur ami à Séries ".

Ni Chartier ni Berrof n'ont donc été récompensés. Par contre, 19-2 a, sans étonnement, mis le grappin sur le prestigieux prix de la meilleure série dramatique, à la toute fin du gala. Un sacre pratiquement incontestable.

Bien content que les qualités d'O' aient enfin été reconnues publiquement. En plus, ce téléroman de TVA ne passe plus en même temps qu'Unité 9 à la SRC, ce qui permettra à plus de téléspectateurs de s'y accrocher les mardis à 21h. Guy Nadon, le chef du clan des O'Hara, a poursuivi sur sa lancée victorieuse, tandis que Marie-Thérèse Fortin de Mémoires vives a été la première comédienne de cette nouveauté radio-canadienne à se démarquer.

Une déception? Que Toute la vérité ait mordu la poussière lors du gala principal. Cette oeuvre intelligente méritait certainement quelques récompenses. La série En thérapie a aussi failli être ignorée, mais la performance d'Élise Guilbault (la psy du psy) a sauvé les meubles. La drolatique Anne Casabonne, qui joue une Claude savoureuse dans La galère, a repris le trophée qu'Anne Dorval lui avait arraché l'an dernier et a ainsi permis à la création de Renée-Claude Brazeau de s'inscrire au tableau des vainqueurs.

Assis au fin fond de la salle, Stéphane Bellavance, ému aux larmes, a brisé la domination de Yan England dans la catégorie jeunesse. Un moment touchant de la soirée.

Message, en terminant: la commandite intégrée de Toyota - et de son remorqueur Richard -, c'est peut-être nécessaire, mais ô combien inélégant.