Le Québécois Marc-André Turgeon est l'un des mannequins les plus en vue. Drôle, simple, naturel et vif dans sa façon de répondre du tac au tac, il est parmi les fans de la première heure de Zoolander. Il a vu une bonne trentaine de fois la comédie culte de et avec Ben Stiller - dont la suite, Zoolander No. 2, prend l'affiche le 12 février, soit 15 ans après l'original.

La Presse l'a joint au téléphone à New York, où il se trouve pour la Fashion Week, afin de tracer un parallèle (ou pas) entre la vie de male model de fiction et la sienne.

Ridiculously Beautiful

Derek Zoolander est devenu mannequin parce qu'il est «vraiment, vraiment, ridiculement beau». Eh bien, pour cette raison justement, peut-être qu'aujourd'hui, il ne percerait pas dans le milieu de la mode! «Les designers recherchent des gens dont les traits peuvent ne pas sembler harmonieux, une allure un peu bizarre [quirky]», fait celui qui se décrit comme un «grand mince, gros nez».

Compétition musclée

Entre Derek Zoolander (Ben Stiller) et Hansel McDonald (Owen Wilson), c'est la guerre. La compétition a les dents longues (et blanches) chez les mannequins. En fiction. Dans la vraie vie? «Pas chez les garçons. On se salue et on se souhaite bonne chance avant les shows. C'est différent chez les filles. Elles rêvent de devenir mannequins depuis toujours. Les garçons sont généralement recrutés par hasard. Ce n'est pas un but ni un rêve.» Et puis, la question de l'argent. Celles qui percent dans ce domaine exercent l'une des deux seules professions «où les femmes gagnent plus que les hommes. L'autre étant l'industrie de la porno».

Derek ou Hansel?

«Je suis absolument plus Hansel que Derek! Je suis sportif, j'aime voyager, rencontrer des gens.» Quant à Derek Zoolander, une citation du personnage résume parfaitement qui et ce qu'il est: «Je suis désolé que des personnes aussi belles que nous vous fassent vomir et sentir mal dans votre peau.» En effet, «ça dit tout», rigole Marc-André Turgeon.

Blue Steel et virage à gauche

«L'équivalent du Blue Steel? Disons le duck face, qu'on voit beaucoup dans les égoportraits! [rires]» Une moue qui peut aussi représenter le Tiger et la Ferrari. «Ce sont toutes les mêmes, à part le Magnum... puisqu'on tourne à gauche en même temps!» Un défi, donc, pour Zoolander, dont le cauchemar est de virer à gauche. Problématique ridicule? C'est pas du pareil au même? Pas tout à fait. «Sur le podium, c'est plus facile de tourner à gauche. Et dans les faits, on tourne plus souvent à gauche qu'à droite.» Ah ben, pauvre Derek!

Une réplique qu'il connaît par coeur

«Il y en a une qui me fait rire chaque fois. C'est quand Matilda, la journaliste, explique que, plus jeune, elle souffrait de boulimie. Derek ne comprend pas où est le problème puisque, dit-il, c'est ce que font les mannequins pour garder la ligne.» Bien sûr, prise dans un contexte «non zoolanderien», la remarque ne porterait pas à rire. Marc-André Turgeon reconnaît d'ailleurs qu'elle ne passerait probablement plus aujourd'hui. Elle resterait... en travers de la gorge, quoi.

Mugatu, pour vrai

Sans aller dans les extrêmes que permet la fiction, pour Marc-André Turgeon, l'équivalent de Mugatu dans l'industrie de la mode serait un combo Raf Simons («Il est hautain») et Karl Lagerfeld («Dans sa manière de se vêtir, qui ne change pas»).

Moment «dérélicte»

L'une des missions du mannequin est de porter avec naturel des tenues que jamais au grand jamais il ne porterait au civil. Derek Zoolander pousse le zèle jusqu'à se transformer en «mer-man» (homme sirène) à des fins publicitaires. «On doit "devenir" le look. Je porte parfois des choses que je n'aime pas mais donne l'impression que c'est naturel pour moi de m'habiller ainsi.» Un exemple? « [rires] Regarde mon dernier show pour JW Anderson.»

Zoolander No. 2

«Oui, je vais aller le voir!» Même si, comme à peu près tout le monde, il en sait assez peu sur le film. «Il paraît que Justin Bieber y meurt, ce qui me fait plaisir. [rires] Bon, d'accord, il fait quand même de la bonne musique...»

Sérieusement culte

Il y a Zoolander, qu'il consomme avec le sourire; et il y a ces autres films qu'il regarde souvent, qui comptent (sérieusement) pour lui: The Big Lebowski des frères Coen, Lost in Translation de Sofia Coppola et l'oeuvre complète de Wes Anderson, laquelle, avec ses couleurs saturées et son esthétique unique, parle à celui qui a un jour aspiré (et aspire peut-être encore) à devenir directeur photo. Il a d'ailleurs étudié dans le domaine. On est loin de la tête creuse façon Derek Zoolander.