Pour quiconque tient pour sacrée l'oeuvre de Jane Austen, Pride and Prejudice and Zombies paraîtra comme une hérésie. Et pour quiconque aime les histoires de zombies pures et dures, Pride and Prejudice and Zombies manquera de chair fraîche (ou putréfiée).

C'est le risque du «mash-up». Tomber entre deux chaises. C'est le pari qu'avait fait et raté Abraham Lincoln - Vampire Hunter et celui que relève mieux Pride and Prejudice and Zombies. Des longs métrages inspirés de romans de Seth Grahame-Smith - tous deux des best-sellers.

Le «mash-up» semble ainsi faire davantage l'unanimité à l'écrit qu'à l'écran. Probablement parce que le lecteur module le mélange comme il l'entend, avec son bagage et son rapport aux oeuvres et aux genres, alors que le spectateur se fait imposer des images.

Aussi, pour une question de traitement. Abraham Lincoln - Vampire Hunter de Timur Bekmambetov se prenait désespérément au sérieux. Alors que, à la manière de Cowboys and Aliens de Jon Favreau, Pride and Prejudice and Zombies de Burr Steers (Igby Goes Down) fait les choses avec sérieux, mais sans se prendre au sérieux.

Pour apprécier, il faut donc accepter de voir là un clin d'oeil à l'oeuvre classique et au mort-vivant fort en demande ces derniers temps.

Et goûter à une direction artistique de qualité (dans l'époque comme dans l'horreur) qu'appuie une distribution solide - en particulier les deux rôles piliers, ceux de la frondeuse Elizabeth Bennet et de l'arrogant, mais craquant Mr. Darcy.

Incarnant le couple mythique, Lily James et Sam Riley manient aussi bien la langue de Jane Austen (bien des dialogues sont directement tirés de ses écrits romanesques ou épistolaires) que l'arme blanche ou à feu.

Cinq filles à marier

Ils sont drôles et sexys, et leurs duels verbaux comme physiques sont, comme il se doit, de fougue et d'électricité. Quant à Matt Smith (Doctor Who), il est bizarrement (et un peu anachroniquement) délicieux en Parson Collins, parti potentiel pour l'une des soeurs Bennet.

Lesquelles, on s'en souvient, sont cinq filles (à marier). Cinq filles qui, dans ce contexte nouveau où les guerres napoléoniennes ont été remplacées par une épidémie qui transforme les gens en zombies, ont été formées aux arts martiaux. Il faut les voir, en introduction, se préparer pour le bal, corsets et couteaux, jupons et poignards. Puis, lorsque les morts-vivants passent à l'attaque, former une étoile de la mort aussi létale que séduisante. Et amusante.

Si l'introduction à cette version revisitée de l'histoire de l'Angleterre de la Régence est plus forte que ce qui suit, si la porte ouverte à une suite (ne pas manquer, pour cela, les images qui se pointent au début du générique de fin) n'est pas nécessaire, si la formidable Lena Headey (Game of Thrones) est sous-utilisée en Lady Catherine de Bourgh, Pride and Prejudice and Zombies est un divertissement sympathique. Amusant dans sa façon de mêler l'horreur aux moeurs et à la hiérarchie sociale de l'époque. Mais rapidement oubliable malgré le bon moment que passera celui qui fera taire (temporairement) la raison pour se laisser aller aux sentiments (même si, d'accord, c'est là une autre histoire).

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Comédie d'horreur. Pride and Prejudice and Zombies (V.F.: Orgueil et préjugés et zombies). De Burr Steers. Avec Lily James, Sam Riley, Bella Heathcote, Matt Smith. 1h48.

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