Hymne engagé truffé de références politiques, historiques et identitaires, Formation a fait couler beaucoup d'encre depuis sa sortie samedi et, surtout, depuis la performance de Beyoncé au spectacle de la mi-temps du Super Bowl, dimanche.

Ode au sud des États-Unis, Formation aborde plusieurs sujets sensibles - la violence policière à l'endroit des Noirs, le racisme - ainsi que des thèmes comme l'affirmation et la fierté de ses origines.

Nous avons demandé à un des porte-parole du Mois de l'histoire des Noirs, le rappeur Webster, de commenter cinq aspects de cette chanson.

Katrina et La Nouvelle-Orléans

Sur ces images, on voit Beyoncé allongée sur une voiture de police submergée par l'eau. Une référence à l'ouragan Katrina qui, en 2005, a ravagé La Nouvelle-Orléans, une ville à forte majorité noire. On a par la suite reproché au gouvernement de George W. Bush de ne pas être suffisamment intervenu dans les zones les plus touchées, habitées par la communauté noire. Le chanteur Kanye West avait même déclaré: «George Bush doesn't care about black people.» «Cette chanson tombe à point, note Webster. Je suis content que quelqu'un de sa trempe prenne position sur la situation des Noirs aux États-Unis.»

Les Black Panthers

La vidéo, réalisée par Melina Matsoukas (Rihanna, Snoop Dogg), montre Beyoncé entourée de danseuses, dans une chorégraphie où on la voit le poing levé. Il s'agit d'une référence aux coureurs américains Tommie Smith et John Carlos, qui avaient protesté contre la ségrégation raciale aux Jeux olympiques d'été de 1968 en baissant la tête et en levant le poing en l'air. C'est aussi une référence au Black Panther Party for Self Defense, formé à Oakland en 1966, un groupe «qui a apporté une forme de structure ainsi qu'un sentiment de fierté à la communauté noire», note Webster. «Beyoncé affiche aussi sa fierté d'être Noire dans cette chanson. C'est un message très positif.» 

Black Lives Matter

Il y a plusieurs références aux violences policières à l'endroit des membres de la communauté noire aux États-Unis. Une première lorsque les danseuses tiennent une affiche sur laquelle il est écrit «Justice 4 Mario Woods», jeune homme tué en décembre dernier à San Francisco, ville hôte du Super Bowl. Il y a aussi ce garçon noir vêtu d'une veste à capuchon qui danse devant une rangée de policiers blancs. La caméra montre un graffiti: «Stop Shooting Us» («Cessez de nous tirer dessus»). Le mari de Beyoncé, JAY Z, a annoncé qu'il allait donner 1,5 million US à des organisations qui militent pour la justice sociale, dont Black Lives Matter. De son côté, Beyoncé versera une partie des recettes de sa tournée à des organismes qui oeuvrent auprès des victimes du scandale de l'eau contaminée à Flint, au Michigan, ville dont les deux tiers de la population sont noirs.

Martin Luther King

Dans le clip, on voit un homme tenir la première page d'un journal avec la photo de Martin Luther King et le titre «More Than a Dreamer». «Tout le monde identifie Luther King à son discours «I have a dream», observe Webster. C'est une icône pas juste pour les Noirs, mais pour tout le monde. Mais ce titre dit aussi qu'il est un homme d'action. Si cette chanson peut piquer la curiosité des gens et les encourager à s'informer, je suis content.»

Les Belles du Sud

Vêtue d'une robe blanche et entourée de «Belles du Sud», «Beyoncé fait un clin d'oeil à l'histoire des États-Unis et se réapproprie l'histoire du Sud qu'on associe toujours à l'esclavage des Noirs», note Webster. La chanteuse rappelle en effet l'existence des Free People of Color, ces Noirs qui habitaient le Sud (ils étaient particulièrement nombreux à La Nouvelle-Orléans). Libres, instruits, ils formaient une véritable bourgeoisie noire.

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Annoncée dimanche, la nouvelle tournée de Beyoncé s'arrêtera au Rogers Centre de Toronto le 25 mai. Les billets pour ce concert sont en vente aujourd'hui à 10 h.