Les éditeurs français deviendraient-ils raisonnables? Avec 555 romans français et étrangers, la rentrée littéraire repasse pour la première fois depuis douze ans sous la barre des 600 nouveautés, tout en privilégiant les primo-romanciers, signe d'un regain d'audace.

L'an dernier, 646 romans avaient été programmés de fin août à octobre. Le pic avait été atteint en 2007 avec 727 ouvrages, selon le dossier de Livres Hebdo consacré à la rentrée, moment-clé de la vie éditoriale qui préfigure la saison des prix littéraires.

«Cette baisse de 14% par rapport à 2012 confirme pour la troisième année consécutive une décrue de la production romanesque», souligne le magazine spécialisé, les éditeurs ayant tiré les leçons de la morosité des ventes de romans en 2012 (-3%) et d'un premier semestre 2013 poussif.

Ce sont surtout les romans français qui reculent: 357 cette année contre 426 en 2012. Les romans étrangers passent pour leur part de 220 l'an dernier à 198.

En revanche, le nombre de premiers romans explose après cinq années de frilosité. En 2013, 86 nouveaux romans sont attendus contre seulement 69 l'an dernier.

Cette rentrée 2013 est aussi marquée par une nouvelle génération d'éditeurs et d'éditrices (les plus nombreuses), qui ont accédé depuis un an à des postes de responsabilité.

Ainsi, la jeune Alix Penent chez Flammarion, éditrice en 2012 des Lisières d'Olivier Adam, suit cette année Les évaporés de Thomas B. Reverdy, sur la disparition inexpliquée d'un homme dans le Japon d'aujourd'hui.

L'éditrice publie aussi le roman «maudit» de Pierre Mérot, Toute la noirceur du monde, récupéré en mai par Flammarion après avoir été supprimé de la rentrée 2013 de Stock par le nouveau directeur général Manuel Carcassonne qui l'avait auparavant refusé chez Grasset.

Le roman de Pierre Mérot, qui met en scène un enseignant désabusé sombrant dans une dérive d'extrême droite, avait déjà été déprogrammé en janvier par Gallimard.

Parmi les romans français, de jeunes auteurs confirment leur talent, comme Nelly Alard avec Moment d'un couple (Gallimard), Cloé Korman avec Les saisons de Louveplaine (Seuil) ou encore Céline Coulon avec Le rire du grand blessé (Viviane Hamy).

Nothomb et d'Ormesson

Du côté des abonnés aux best-sellers, Amélie Nothomb, plus prévisible que la météo, revient avec La nostalgie heureuse (Albin Michel), son 22e roman depuis 1992. La Dame au chapeau est de retour au Japon sur les traces de son enfance et d'un amour de jeunesse.

Chez le même éditeur, Éric-Emmanuel Schmitt fait parler Les perroquets de la place d'Arezzo, tandis que Jean d'Ormesson, 88 ans, offre une randonnée dans la beauté du monde, avec Un jour je m'en irai sans en avoir tout dit (Robert Laffont).

Parmi les grands crus 2013, on trouve aussi Naissance (Grasset) du romancier et cinéaste Yann Moix, l'auteur de Podium, Les anges meurent de nos blessures de l'Algérien Yasmina Khadra (Julliard), auteur de L'Attentat, ou La grâce des brigands (L'Olivier) de Véronique Ovaldé.

De belles promesses se profilent avec Palladium (Stock) de Boris Razon, récit halluciné de sa paralysie pendant plusieurs mois, ou Nue (Minuit) de Jean-Philippe Toussaint, épilogue de son thriller passionnel débuté en 2002 avec Faire l'amour.

Au rayon consistant des premiers romans, citons Upsilon Scorpii (Gallimard) de Marie Modiano, fille de Patrick Modiano, Immortelles (Grasset) de Laure Adler, Mobiles de Sandra Lucbert (Flammarion) ou encore Le Produit (Seuil) de Kevin Orr.

Quant au premier roman d'Aurélien Goulard, Dans la vie d'un homme, il a été déprogrammé par les éditions Anne Carrière pour cause de plagiat...

Le doyen des primo-romanciers, Pascal Aubier, a 70 ans, la benjamine, Jade-Rose Parker, 25 ans.

Côté étranger, plusieurs grands noms sont au rendez-vous tels le Sud-africain Nobel de littérature John M. Coetze, avec Une enfance de Jésus (Seuil), l'Irlandais Colum McCann avec Transatlantic (Belfond) ou encore l'Argentin Alan Pauls avec Histoire de l'argent (Bourgois).