En 1997, un policier et quelques travailleurs de rue du nord de la ville cherchaient une façon d'amasser des fonds pour la Fondation Jeunesse. Ils ont tout de suite pensé à un gros festival de musique - le jazz était déjà pris - qu'ils allaient présenter une seule fois. Les choses ont toutefois suivi un autre cours...

«On a organisé un festival de blues et on est toujours là 16 ans plus tard», raconte Gilles Gauvreau, policier à la retraite et fondateur du FestiBlues international de Montréal qui commence jeudi au parc Ahuntsic. Avec une programmation blues à 90%», nous dit le communiqué.

«Un festival qui ne présenterait que du blues ne pourrait pas survivre, soutient M. Gauvreau. Alors, on a pris le parti de présenter quelques spectacles grand public (festiblues.com).»

Garou, qui se produira vendredi sur la grande scène Loto-Québec à 21h30, fait partie de cette catégorie, mais il arrive aussi avec son CD Rhythm&Blues qui nous a fait passer une belle soirée le mois dernier au Festival de jazz; Garou a le blues dans la voix, quoi qu'il chante.

Bob Walsh, lui, est 100% blues, joue avec un bandtop niveau et chantera dimanche, en clôture du FestiBlues, avec Nanette et Martin Deschamps. Pas d'écart stylistique là non plus.

Non-blues

Dans les 10% officiellement non-blues de l'affiche apparaissent deux autres gros noms québécois: le trio hip-hop Loco Locass (jeudi) et Louis-Jean Cormier avec ses invités Vincent Vallières et Marie-Pierre Arthur (samedi).

Le leader du groupe Karkwa - actuellement en réserve de la république (voir autre texte) - poursuit avec son projet solo une virée festivalière qui l'a conduit des FrancoFolies au Festival d'été de Québec en passant par Tadoussac, Petite-Vallée et Sorel.

«L'ampleur de la demande nous a un peu surpris», a avoué l'auteur-compositeur-interprète, rencontré cette semaine dans un restaurant de la rue Fleury, en plein coeur d'Ahuntsic où il a son studio.

Et cette invitation au FestiBlues, surprenante aussi? «Ils ne nous ont pas demandé de faire un show blues, mais on sait qu'on peut faire des clins d'oeil...»

Quand il parle de blues, «L.J.» se dit «bien loin du Bistro à Jojo». Rocker pour les uns, «folkeux» pour d'autres, il rappelle son penchant pour le bluegrass, musique traditionnelle des Appalaches américaines, très près du country. Le guitariste évoque ici les noms de maîtres tels Hank Williams et Chet Atkins, créateur du Nashville sound qui a sorti le country de la grange.

Une affaire de tripes

«Tout ça nous fait remonter au blues», lance Cormier qui connaît bien l'histoire de la musique, comme son parcours nous le fait deviner: dix ans de piano classique, trois de guitare classique, période au cours de laquelle il jouait «du Metallica en cachette». Le tout suivi d'études collégiales en jazz (à Saint-Laurent) où ce surdoué a surtout appris que «la création ne s'enseigne pas».

Le blues non plus probablement... «Le blues, c'est plus qu'une structure ou un rythme. C'est une affaire de tripes, de souffrance. Lisa LeBlanc n'est pas une chanteuse de blues, mais elle a le blues en elle.»

Et Louis-Jean Cormier de raconter cette leçon de vie qu'il a retenue de sa collaboration avec l'Acadienne dont il a réalisé le premier CD.

«Elle voulait une voix d'homme sur une chanson et je l'ai faite, assez bien, je croyais. Quand je suis revenu dans la régie, Lisa a dit: «Oui, c'est bon. Maintenant, refais-le avec tes couilles...» »

Samedi, Louis-Jean Cormier jouera avec tout cela plus sa formation habituelle: Guillaume Chartrain à la basse, Marc-André Larocque à la batterie, Adèle Trottier-Rivard aux voix et percussions et Simon Pedneault, un crack de l'Isle-aux-Coudres qui fait sourire son leader: "Ça, ça joue de la guitare!»

Et «ça» doit jouer du blues aussi... Gageons-nous une pinte de Grolsch que Louis-Jean Cormier et ses comparses auront préparé, pour leur passage au FestiBlues, quelques mesures efficaces pour nous amener au Treizième étage du bonheur: Y'ont mis du blues/Dans l'ascenseur/Depuis y'a plus personne/Qui pense à ses malheurs.