Des personnes lourdement handicapées ont été victimes de négligence et de mauvais traitements au centre hospitalier de soins de longue durée (CHSLD) Centre-ville de Montréal l'automne dernier, a appris La Presse. La situation était à ce point grave que l'institution a congédié un préposé aux bénéficiaires, un geste rare. Et au moins une infirmière auxiliaire a été suspendue.

Selon le comité des résidants du CHSLD et le centre de santé et des services sociaux (CSSS) Jeanne-Mance, qui chapeaute l'établissement, la situation est revenue à la normale à l'unité 8. Les sanctions sont tombées rapidement, assurent-ils.

En novembre dernier, des résidants de l'unité 8 se sont plaints du comportement d'un préposé aux bénéficiaires. Le président du comité des résidants, Jean Noiseux, a alerté la direction de l'établissement le 20 novembre dans un courriel, que La Presse a obtenu. «Que se passe-t-il exactement à l'unité 8? Selon nos informations, il y aurait plusieurs cas de maltraitance de résidants, au nombre de trois ou quatre, spécifiquement auprès de ceux qui ont de la difficulté à s'exprimer. Il s'agit de cas de brutalité intentionnelle à répétition en cours de manoeuvres, ce qui nous apparaît assez grave», écrit-il.

Joint par La Presse, M. Noiseux s'est montré prudent. Il a affirmé que le préposé ne donnait pas les soins auxquels les résidants ont droit. «Des gens étaient laissés dans leurs selles trop longtemps», a-t-il donné pour seul exemple. Questionné afin de savoir pourquoi il avait utilisé l'expression «brutalité intentionnelle», il s'est contenté de répondre que «dans un cas, il est arrivé quelque chose, et c'est pour ça que l'employé a été congédié».

D'autres sources ont affirmé à La Presse que le préposé faisait des «gestes brusques» et que ses paroles l'étaient tout autant. Il «manquait d'empathie». Il ne répondait pas aux résidants qui actionnaient leur cloche d'appel. Il parlait au téléphone cellulaire en donnant les soins.

Selon Martine Dubois, porte-parole du CSSS Jeanne-Mance, «il y avait des écarts en lien avec des procédures et le respect du plan de travail». «Ces écarts étaient inadmissibles», s'est-elle limitée à dire.

La commissaire aux plaintes et la direction des ressources humaines ont lancé des enquêtes. L'employé a été congédié en décembre. C'est une mesure «rare», a reconnu Mme Dubois.

La direction avait également des reproches à faire à une infirmière auxiliaire qui travaillait dans la même unité. Elle a été suspendue pendant 10 jours.

«Pour nous, c'est vraiment tolérance zéro par rapport aux écarts. C'est un message qui est non seulement passé, mais qui est appliqué», a affirmé Martine Dubois. Elle a indiqué que «la très grande majorité du personnel est très dévouée». «Quand il y a des cas d'exception, des écarts qui sont constatés, la direction s'en occupe rapidement», a-t-elle ajouté.

Jean Noiseux s'est dit satisfait de la réaction de la direction. «Le mot d'ordre, c'est d'être extrêmement vigilant», a-t-il souligné.

Indemnités versées pour d'autres cas de maltraitance

La réaction rapide du CHSLD tranche avec le laxisme qui a déjà régné au sein de cet établissement dans les années 90 et au début des années 2000. Des centaines de victimes de maltraitance de cette époque recevront d'ailleurs des indemnités totalisant 7 millions de dollars en vertu d'un règlement à l'amiable annoncé vendredi.

Ce jour-là, le CHSLD a tenu une conférence de presse et convié les journalistes à une visite pour démontrer que cet épisode appartient au passé. La directrice de l'établissement, Hélène Larochelle, a assuré que tout est fait pour garantir des services de qualité aux résidants. «Je ne vous dis pas qu'il ne se passe jamais rien, a-t-elle dit. Mais ce qu'il faut retenir, c'est qu'il y a des mesures qui ont été mises en place pour assurer une qualité de vie.»