Les fonctionnaires obéiront aux ordres du gouvernement lorsqu'ils se prononceront sur les demandes d'autorisations pour les forages pétroliers de l'île d'Anticosti, a déclaré, mardi, le premier ministre Philippe Couillard.

La semaine dernière, M. Couillard avait signifié son intention de tout faire pour empêcher ces fracturations hydrauliques sur cette île du golfe Saint-Laurent.

Questionné sur le poids de ses déclarations dans l'analyse qui sera faite des impacts environnementaux, M. Couillard a expliqué que les fonctionnaires impliqués dans le dossier devront en tenir compte.

«Ils feront ce qu'on leur dira», a-t-il dit dans un point de presse.

À l'Assemblée nationale, avant une réunion de ses députés, M. Couillard s'est défendu de s'ingérer dans un processus administratif entre les mains des fonctionnaires.

«C'est bien la moindre des choses pour les générations suivantes et la population du Québec qu'on porte un soin particulier à ce milieu naturel», a-t-il dit.

Le premier ministre a répété qu'il attendait précisément les résultats d'une étude hydrogéologique effectuée à Anticosti par le ministère de l'Environnement.

«C'est clair qu'on va être excessivement attentifs aux résultats des études sur l'eau», a-t-il dit.

Selon le premier ministre, à défaut de s'être ainsi prononcé contre les forages hydrauliques, une méthode controversée nécessitant l'utilisation de produits chimiques, les médias l'auraient accusé d'avoir un biais favorable à l'industrie pétrolière.

«Si je restais passif devant une telle agression envers un milieu naturel du Québec, on me blâmerait d'être au service de l'industrie pétrolière, a-t-il dit aux journalistes. Les mêmes questions, les mêmes personnes ici me diraient: comment se fait-il que vous permettez ça?»

Le gouvernement québécois est partenaire dans l'exploration des hydrocarbures de schiste contenus dans le sous-sol de l'île d'Anticosti.

Au cours des dernières semaines, M. Couillard a multiplié les déclarations pour se dissocier du projet, ratifié par le précédent gouvernement péquiste, en 2014, mais initié alors que les libéraux étaient au pouvoir, en 2012.

L'échéancier des travaux d'exploration prévoyait que la décision d'amorcer la deuxième phase d'exploration avec fracturation hydraulique dans trois puits serait prise au début de cette année.

Le chef péquiste Pierre Karl Péladeau a estimé que les déclarations de M. Couillard pavaient la voie à des recours judiciaires.

«J'ai bien peur, tristement, que ça finisse devant les tribunaux et que, le cas échéant, peut-être que le premier ministre soit appelé à témoigner ou éventuellement on lui fera signer des affidavits», a-t-il dit.

Le chef caquiste, François Legault, s'attend également à des recours judiciaires des entreprises partenaires du projet d'exploration.

«M. Couillard est en train de nous dire que le BAPE et toutes les vérifications environnementales dépendent de lui, voyons, j'espère que c'est indépendant ces vérifications-là», a dit M. Legault.

Le ministre de l'Environnement, David Heurtel, a confirmé mardi que ses fonctionnaires auront à décider si la fracturation hydraulique est autorisée sur Anticosti, à la lumière des résultats d'une étude hydrogéologique.

«Dans le contexte actuel, elle est faite par une firme indépendante et il n'y a aucune forme d'ingérence politique dans ce processus», a-t-il dit.

Le ministre des Ressources naturelles, Pierre Arcand, a affirmé que «le certificat d'autorisation en environnement était tout à fait indépendant de la question politique».

M. Arcand a expliqué que les résultats de cette étude permettront d'avoir un portait des impacts sur les ressources hydriques.

«Si en cours de route, il y a un problème relié à l'eau, c'est clair qu'on n'ira pas faire de la fracturation», a-t-il dit.

La semaine dernière, M. Arcand avait affirmé qu'une filiale de la société d'État Investissement Québec avait agi sans avertir le gouvernement libéral en concluant une lettre d'intention, en 2012, avec des entreprises d'exploration sur l'île.

Le ministre des Transports Jacques Daoust, qui dirigeait Investissement Québec à cette époque, ignorait également cette initiative.

«On intervient quand la transaction se fait, à ce moment-là ça va plus haut, mais à cette étape là je n'étais pas au courant», a-t-il dit.

Selon M. Daoust, la filiale Ressources Québec n'avait pas à informer le gouvernement pour une simple lettre d'intention.