L'époque où le Canada faisait la leçon aux autres pays qui bafouent les droits de la personne, tout en tournant le dos aux peuples autochtones vivant dans des conditions dignes du tiers-monde sur son propre territoire, est révolue, affirme sur un ton sans équivoque le premier ministre Justin Trudeau.

Élu en promettant notamment de mettre en oeuvre toutes les recommandations de la Commission vérité et réconciliation, mise sur pied après que le gouvernement fédéral eut offert des excuses aux nombreux autochtones qui ont été victimes d'agressions sexuelles et de sévices durant leur séjour dans les écoles résidentielles, M. Trudeau entend faire de l'amélioration des conditions de vie des Premières Nations l'une de ses priorités durant son mandat.

Pour lui, cela commence par dénoncer l'hypocrisie dont a souvent fait preuve le Canada dans le passé. M. Trudeau s'est animé hier quand il a été invité à définir ce qu'il a en tête quand il dit vouloir rétablir les relations entre le gouvernement fédéral et les peuples autochtones sur la base d'une approche de « nation à nation ».

Pendant trop longtemps, a-t-il affirmé, les gouvernements qui se sont succédé ont failli à leur devoir de respecter les traités qui avaient été conclus entre les premiers colons et les peuples autochtones.

« Il faut changer cette attitude », a-t-il martelé. « C'est une responsabilité que nous avons de traiter avec respect, ouverture et compréhension ce qu'était à l'origine cette idée de partenariat qu'on a complètement tassée et ignorée et rejetée pendant longtemps parce que cela faisait notre affaire.

« On a vu ce vers quoi cela nous a menés. Des femmes assassinées et disparues, les problèmes des écoles résidentielles, une hypocrisie de la part d'un pays qui faisait la leçon aux autres pays dans le monde sur les droits de la personne, la lutte contre la pauvreté, le racisme, sans avoir la volonté de s'attaquer à ce qui est une honte au Canada pour nous », a-t-il enchaîné.

À n'importe quel prix

Déjà, des hauts fonctionnaires l'ont mis en garde contre les coûts, sur le plan juridique, de vouloir rétablir les relations sur une base de nation à nation.

« S'il y a des avocats qui viennent me dire que "non, non, nation à nation, ça va impliquer des grosses dépenses", eh bien, tant mieux ! Il est temps qu'on prenne au sérieux nos responsabilités par rapport aux peuples autochtones. Ça fait trop longtemps qu'on fait ce qui est commode, qu'on essaie des tours de passe-passe », a-t-il laissé tomber.

Son gouvernement, a-t-il soutenu, va miser sur la réussite des jeunes autochtones en leur accordant l'accès à une meilleure éducation, à de meilleurs logements, à de l'eau potable, car « la réussite des jeunes des communautés autochtones, ce n'est pas juste la réussite de ces communautés. C'est la réussite de notre pays ».

« La plus grande proportion de jeunes au pays se trouve dans les communautés autochtones. C'est notre avenir. Nous avons une population vieillissante. Nous avons besoin de jeunes. Assurons-nous qu'en matière d'éducation, de logement, d'eau potable, on est en train d'atteindre un seuil minimum », a-t-il plaidé.

Message aux entreprises

Chose certaine, les entreprises qui veulent exploiter les ressources naturelles devront tenir compte des préoccupations des peuples autochtones, voire conclure des partenariats avec eux, pour que leurs projets aillent de l'avant.

« La Cour suprême du Canada nous l'a dit clairement. Il faut reconnaître leurs préoccupations et établir des partenariats avec les Premières Nations qui, d'ailleurs, ne veulent que cela. [...] C'est sûr que pour l'industrie, c'est peut-être moins payant, mais c'est une question de justice fondamentale », a-t-il soutenu.

Depuis son arrivée au pouvoir, M. Trudeau a multiplié les rencontres avec les leaders des peuples autochtones et jeté rapidement les premières bases d'une commission d'enquête sur la disparition et l'assassinat des femmes et filles autochtones.