Le gouvernement canadien fait «très, très peu» pour accueillir les réfugiés syriens victimes de la guerre qui fait rage dans le pays.

C'est en tout cas ce que croit le Conseil canadien pour les réfugiés (CCR), qui affirme que la réaction canadienne «ne répond pas à la réalité" syrienne.

«Il y a une grosse frustration par rapport à l'annonce du Canada, qui laisse croire qu'il ouvre sa porte aux réfugiés, alors qu'il s'agit d'une annonce plus ou moins vide», a dit à La Presse Janet Dench, directrice générale du CCR, qui regroupe plusieurs organismes de défense des droits des réfugiés.

Citoyenneté et Immigration Canada a annoncé en juillet que le Canada pourrait recevoir jusqu'à 1300 réfugiés syriens d'ici l'an prochain. Ottawa ne s'engage cependant à prendre en charge que 200 de ces réfugiés. Les 1100 autres devront être parrainés par des organismes ou des groupes de citoyens, qui devront s'engager à les soutenir financièrement. Selon le CCR, ces coûts de prise en charge s'élèvent à entre 8 et 12 millions au total.

«Ce que fait Ottawa, c'est prendre un engagement au nom d'autres groupes sans même les aviser ou les consulter. Ces groupes aimeraient bien répondre à l'appel, mais ils se heurtent à plusieurs obstacles, dont des délais de traitement très longs», dénonce Mme Dench.

Selon le site web du gouvernement canadien, les délais de traitement pour des demandes de parrainage de réfugiés sont actuellement de 20 mois à Beyrouth (Liban), de 21 mois à Amman (Jordanie), de 24 mois à Ankara (Turquie) et de 40 mois au Caire (Égypte).

«Le gouvernement canadien a mis un grand X sur la question des réfugiés syriens», dénonce Faisal Alazem, porte-parole du Conseil canado-syrien, qui affirme qu'Ottawa avait été beaucoup plus proactif lors de tragédies comme le génocide au Rwanda, la guerre au Kosovo ou le tsunami en Asie.

Québec, qui possède certains pouvoirs en immigration, dit avoir fait connaître son programme de parrainage collectif auprès de la communauté syrienne, mais affirme ne pas pouvoir faire plus.

«La compétence auprès des réfugiés vient du fédéral», dit Jean-François Lemieux, attaché de presse de la ministre de l'Immigration et des Communautés culturelles, Diane De Courcy.

À la suite du séisme en Haïti, Québec avait facilité la réunion des familles qui avaient des membres dans la province et en Haïti.

Ottawa fait valoir que ses programmes répondent aux besoins dans la mesure où l'exode de réfugiés syriens vers des pays comme le Canada n'est pas encore envisagé.

«Il est important de savoir que les Nations unies ne demandent pas en ce moment que plus de pays accueillent des réfugiés, précise Kevin Menard, porte-parole au cabinet du ministre de la Citoyenneté et de l'Immigration, Chris Alexander. Le Haut Commissariat pour les réfugiés n'a pas commencé le processus à grande échelle pour la réinstallation des populations déplacées. Les priorités demeurent la satisfaction des besoins de base, le maintien de l'ouverture des frontières, et trouver une solution politique à la crise, plutôt que la réinstallation.»

Aux dernières nouvelles, sur les 200 réfugiés que le gouvernement fédéral a promis de prendre lui-même en charge, seulement neuf avaient été réinstallés au Canada. Ottawa affirme que ce chiffre n'est pas à jour, mais n'a pas été en mesure hier d'en fournir un plus récent.

Augmentation des demandes

Dans tous les cas, ces neuf réfugiés syriens ne sont pas les seuls à être arrivés au Canada cette année.

Ottawa affirme qu'en comptant aussi les parrainages privés, «des dizaines» de réfugiés syriens ont été réinstallés au Canada cette année, et «des dizaines d'autres» l'ont été depuis le début du conflit.

À cela s'ajoutent les réfugiés syriens qui se rendent directement au Canada pour faire une demande d'asile et qui sont de plus en plus nombreux. Au cours des six premiers mois de 2013, 143 demandes ont été acceptées, contre 157 pour toute l'année 2012. En 2009, en comparaison, seulement 13 demandes avaient été acceptées. Tant le nombre de demandes que le pourcentage de demandes acceptées sont en augmentation depuis 2011, qui marque le début de la guerre civile en Syrie.

Le CCR dénonce par ailleurs le fait que le gouvernement canadien n'a pas imposé de moratoire sur le renvoi de Syriens vers leur pays d'origine et qu'il autorise au compte- gouttes les demandes de visa d'étudiant et de visiteur, de peur que les gens restent au Canada.