Les premiers ministres des provinces et des territoires se réunissent à Niagara-on-the-Lake aujourd'hui et demain dans le cadre du Conseil de la fédération. Des sujets délicats et quelques désaccords devraient alimenter les discussions du groupe formé d'un nombre sans précédent de femmes. Aperçu de l'ordre du jour.

MUSKRAT FALLS

Lundi, Hydro-Québec a déposé un recours judiciaire que plusieurs appréhendaient depuis longtemps à Terre-Neuve-et-Labrador (T.-N.L.). La société d'État a demandé à la Cour supérieure de clarifier ses droits en vertu du fameux contrat de 1969, qui lui permet d'acquérir de l'énergie à bas prix de la centrale hydroélectrique de Churchill Falls. Ce pavé dans la mare s'inscrit dans le contexte du développement du projet de centrale de Muskrat Falls, qui comprend l'aménagement de câbles sous-marins entre le Labrador, Terre-Neuve et la Nouvelle-Écosse pour permettre à la province de trouver des débouchés pour son énergie hydroélectrique. Selon certains, ce recours d'Hydro-Québec pourrait sonner le glas de cet ambitieux chantier de plus de 7 milliards de dollars. La première ministre de T.-N.L., Kathy Dunderdale, a qualifié le geste d'arrogant, d'obstructionniste et de désespéré.

ABOLITION DU SÉNAT

Le scandale des dépenses qui ébranle le Sénat pourrait alimenter les discussions au Conseil de la fédération. Des premiers ministres comme ceux de la Saskatchewan, de la Nouvelle-Écosse ou du Manitoba prônent l'abolition de la Chambre haute. D'autres, comme celle de l'Alberta, favorisent plutôt un Sénat élu. Mais le Québec compte rester en marge du débat, même s'il a intenté un recours judiciaire contre la tentative de réforme d'Ottawa: «Notre gouvernement n'a pas pour objectif de réformer les institutions fédérales, a expliqué hier l'attachée de presse de la première ministre Pauline Marois, Marie Barrette. L'idée de réformer ou d'abolir le Sénat ne figure pas dans les priorités du gouvernement.»

FORMATION DE LA MAIN-D'OEUVRE

Le gouvernement Harper a provoqué la colère du gouvernement Marois, en mars, lorsqu'il a annoncé une réforme des programmes de formation de la main-d'oeuvre dans son budget. Cette mesure sera financée à même les sommes transférées aux provinces, privant Québec de 75 millions de dollars. Le gouvernement péquiste n'est pas le seul à monter au front pour contester l'initiative fédérale. La première ministre de l'Ontario, la libérale Kathleen Wynne, tente de convaincre Ottawa de reculer depuis des mois. Stephen Harper a confié le dossier au très actif Jason Kenney lors de son remaniement ministériel de la semaine dernière, signe pour plusieurs observateurs qu'il n'entend pas reculer. L'Ontario accueille les premiers ministres provinciaux réunis au Conseil de la fédération, donc le sujet sera assurément au menu des discussions.

LA ROUTE DU PÉTROLE

Les projets d'oléoduc Northern Gateway vers la Colombie-Britannique et Keystone XL vers les États-Unis semblent bloqués. L'Alberta tente par tous les moyens de trouver de nouveaux débouchés pour le pétrole dérivé des sables bitumineux, dont le cours est systématiquement plus bas que le pétrole conventionnel. Les raffineries du Québec et du Nouveau-Brunswick sont dans la ligne de mire de l'industrie pétrolière. Deux projets, l'inversion de la ligne 9 d'Enbridge et la conversion du gazoduc de TransCanada, sont actuellement dans les cartons. Les écologistes et des municipalités ont exprimé de sérieuses réserves sur l'arrivée au Québec du pétrole bitumineux. Pauline Marois et son homologue albertaine Alison Redford ont formé un groupe de travail pour discuter de cet enjeu. La réunion de Niagara-on-the-Lake sera l'occasion de faire le point.

LES FEMMES AU POUVOIR

La réunion de cette semaine confirme l'ascension sans précédent des femmes dans les plus hautes sphères du monde politique. Cinq des dix premiers ministres et un leader de territoire sur trois sont des femmes. Certains croient que les moeurs politiques s'adouciront avec la féminisation des élus, mais des confrontations sont assurément au menu. Pauline Marois risque de croiser le fer avec son homologue terre-neuvienne, Kathy Dunderdale, sur le développement hydroélectrique du Bas-Churchill. L'an dernier, les redevances pétrolières se sont retrouvées au coeur d'un affrontement entre la première ministre albertaine Alison Redford et son homologue de la Colombie-Britannique, Christy Clark. Ce sera d'ailleurs la première rencontre entre Mme Marois et la première ministre de l'Ontario, Kathleen Wynne.