Le gouvernement du Québec devrait mieux encadrer l'implantation du virage à droite au feu rouge (VDFR) et inciter les municipalités à faire un suivi adéquat des accidents et des conflits qui surviennent aux intersections où cette manoeuvre est permise.

Selon des documents de la Table québécoise de sécurité routière (TQSR) obtenus par La Presse, l'organisme doit recommander vendredi, à Québec, quatre pistes d'action «qui ne visent pas à interdire ou enlever le VDFR, mais à réduire le nombre des conflits entre usagers, en privilégiant les usagers vulnérables», soit les cyclistes et les piétons, et en particulier les enfants et les personnes âgées.

Dix ans après l'implantation du virage à droite au feu rouge, partout au Québec sauf dans l'île de Montréal, on estime que cette manoeuvre a entraîné la mort de six personnes, des blessures graves à 33 autres et qu'elle a fait 712 blessés légers. Deux de ces décès et six des accidents avec blessures graves se sont produits à Montréal, où cette manoeuvre n'a jamais été permise.

En tenant compte de ce bilan, la TQSR invite le ministère des Transports du Québec à revoir son «Guide de mise en oeuvre du VDFR» et à resserrer «les critères en tenant compte des enjeux liés à la visibilité du piéton et du cycliste, à la présence d'un brigadier [scolaire], de clientèles vulnérables, de feux sonores pour aveugles, d'une piste cyclable, etc.».

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La Table souhaite aussi que les municipalités, qui gèrent 85% des intersections avec feux de circulation dans la province, exercent un «suivi de la performance» en dénombrant rigoureusement les accidents, les infractions et les autres événements liés spécifiquement aux virages à droite au feu rouge.

Selon la TQSR, lorsqu'on constate «plus de trois accidents sur une période de douze mois consécutifs causés par des manoeuvres de virage à droite au feu rouge dans l'une des branches de l'intersection», l'interdiction d'effectuer cette manoeuvre serait justifiée.

L'organisme recommande aussi la formation d'un «comité de suivi» qui aurait pour mandat de colliger toutes les données relatives aux accidents et infractions liés au VDFR et aussi de suivre l'évolution des comportements de tous les usagers aux intersections.

Enfin, la TQSR recommande «une campagne nationale de sensibilisation annuelle sur le respect des règles de base de la manoeuvre de VDFR sécuritaire», appuyée «d'activités de surveillance policière».

On estime que l'article de loi qui permet le VDFR est «méconnu dans son intégralité». Cet article stipule en effet qu'«à moins de signalisation contraire, l'usager de la route, face à un feu rouge, peut effectuer un virage à droite après s'être immobilisé avant le passage pour piétons ou la ligne d'arrêt.

«S'il n'y en a pas, il doit le faire avant la ligne latérale de la chaussée sur laquelle il veut s'engager après avoir cédé le passage aux piétons, aux conducteurs ou aux cyclistes engagés dans l'intersection, ou si près de s'engager qu'il s'avérerait dangereux d'effectuer ce virage».

«La dernière fois qu'il y a eu une campagne sur le VDFR, signale un des documents de la TQSR, ça remonte dans les années où on a instauré cette manoeuvre.»

Au Canada et aux États-Unis, seules les villes de Montréal et New York interdisent la manoeuvre sur l'ensemble de leur territoire.