À 12 h 15, le 21 juin 2012, Claude Courtemanche était bien en vie dans la partie commune du département de psychiatrie de l'hôpital Notre-Dame, au 7e étage. Quarante minutes plus tard, il était assis dans le fauteuil de sa chambre, inanimé.

« Il avait les deux bras le long du corps, le visage bleuté et rouge, la langue pendante. Il avait des marques rouges au cou. C'était clair qu'il venait d'être étouffé ou étranglé », a relaté Réal Montpetit, préposé aux bénéficiaires qui a trouvé le patient, et qui témoignait hier au procès d'Idelson Guerrier, à Montréal.

M. Montpetit a relaté que juste avant d'entrer dans la chambre du patient Courtemanche, ce fameux jour, il avait vu le patient Guerrier « jogger » vers la sienne, comme s'il « se poussait de quelque chose ». C'était anormal, car à cette heure, entre 12 h 30 et 13 h 30, chaque patient devait être dans sa chambre pour la sieste, selon le protocole de l'unité. Et il est interdit de courir dans le corridor, a-t-il précisé.

M. Montpetit a fait le Code bleu. Une équipe de réanimation s'est précipitée, mais n'a pas pu ramener M. Courtemanche à la vie. M. Montpetit a pris une pause dîner un peu plus longue en raison de l'incident.

« J'étais perturbé. Voir ça dans les films, c'est une chose, mais en réel, c'est autre chose. »

Quand il est revenu au travail, dans l'après-midi, il a averti le personnel de « faire attention à Guerrier », car il l'avait vu sortir de la chambre de M. Courtemanche. « J'ai dit : "Il va faire quelque chose d'autre." »

Surpris dans la chambre d'une patiente

Le jury chargé de juger Guerrier a déjà entendu depuis le début du procès que le lendemain, soit le 22 juin 2012, vers 6 h le matin, Guerrier avait été surpris dans la chambre d'une patiente, Iolanda Bertocchi. Il aurait tenté de l'étouffer avec une serviette.

Après ce dernier incident, le personnel a décidé d'appeler la police. Le même jour, deux psychiatres, le Dr Cédric Andres, chef d'unité, et le Dr Gérard Montagne, ont rencontré Guerrier et ont convenu qu'il allait assez bien pour recevoir son congé de l'hôpital et être remis aux policiers, avec des prescriptions de médicaments. Il pourrait être suivi à l'infirmerie à l'endroit où il serait amené. Les deux psychiatres ont témoigné au procès, hier.

Rappelons que le 13 juin, Guerrier était arrivé aux urgences en ambulance, après un appel au 9-1-1 pour un homme en psychose. Il se croyait suivi par des espions, et pensait que sa femme faisait partie du complot. Dans les jours suivants, avec la médication, son état a semblé s'améliorer. Il répondait par des réponses brèves, mais était souriant et calme. Le diagnostic s'orientait vers un trouble psychotique secondaire à l'abus chronique de cannabis. Guerrier avait dit prendre une once de cannabis tous les 10 jours, et il avait eu un test positif au cannabis à son arrivée.

Guerrier n'était pas loin d'obtenir son congé de l'hôpital. Mais le 22 juin, après l'agression de la patiente Bertocchi, c'est la police qui allait venir le cueillir, et il fallait décider s'il allait assez bien mentalement pour partir.

Le Dr Cédric Andres évaluait que la maladie de Guerrier était en rémission. Il n'y avait pas de signe actif de psychose ou de dépression, pas d'idées suicidaires », a-t-il raconté hier.

Le psychiatre Gérard Montagne a noté que lors de la rencontre du 22, Guerrier ne manifestait aucune empathie pour ce qu'il avait fait subir à Mme Bertocchi. « Je me serais attendu à ce qu'il se mette à la place de la patiente. Mais c'est une impression générale de froidure, d'indifférence qu'il avait. Il n'avait pas d'autocritique, pas de préoccupation face à quelque chose de grave. Son jugement semblait présent. Il me donnait l'impression d'être responsable de ses actes, d'être capable de faire la distinction entre le bien et le mal », a-t-il dit.

Le procès se poursuit aujourd'hui.