Le club de pédophiles frappé par la police il y a deux semaines avait obtenu par la supercherie un statut d'organisme sans but lucratif pour promouvoir ses actions et offrir des services de sécurisation des communications, a reconnu le gouvernement hier. Une dizaine de sympathisants du groupe sont d'ailleurs toujours en liberté, dont certains ont tenté de se rapprocher d'enfants, selon ce qu'a appris La Presse. L'un d'eux promet même ouvertement de continuer "l'oeuvre" du club.

« Je n'ai pas l'intention d'abandonner ! » a lancé Jacques Beausoleil hier lorsque joint au téléphone à sa résidence du boulevard René-Lévesque, à Montréal.

L'homme se voit comme un militant. Il est l'un des administrateurs de l'organisme Les Amis de toutes les minorités sexuelles (LATMS), un organisme enregistré officiellement au Registre des entreprises et autour duquel était regroupé le club de pédophiles démantelé par la Sûreté du Québec dans le cadre de son opération baptisée « Malaise ».

L'organisme, dont l'existence a été évoquée hier par la station RadioX de Québec, avait été enregistré en 2011. Officiellement, il s'agissait d'une « organisation civique et amicale » qui offrait aussi des « services informatiques ».

Mais selon la direction du Registre des entreprises, les fondateurs ont fait preuve de « perfidie » en cachant leur véritable but. L'organisme gouvernemental a signifié au cours des derniers jours une requête qui sera présentée en Cour supérieure afin de faire dissoudre d'urgence l'organisme, pour des motifs « d'intérêt public ». Les fonctionnaires n'ont découvert la connotation pédophile du groupe qu'après l'opération policière.

« Les concepts de pédophilie et pédérastie évoquent certainement une idée immorale, obscène et scandaleuse manifestement contraire à l'intérêt public », précise la requête.

« Il est manifeste que la défenderesse a servi et sert de plateforme, visant à mettre diverses ressources à la disposition de pédophiles et de pédérastes. »

Les membres visaient ainsi à « créer, élargir, organiser et entretenir un réseau de pédophiles et pédérastes ».

Des extraits de textes publiés sur le site web du groupe parlent d'eux-mêmes.

« LATMS est née avec et pour nos amis pédophiles et pédérastes et nous sommes prêts à offrir la même écoute attentive et respectueuse à toutes les minorités sexuelles taboues », peut-on lire.

« Nous croyons qu'il n'y a aucune raison pour démoniser une orientation affective sous prétexte que certaines personnes commettent des abus », est-il écrit.

« Il y a actuellement autour de nous un certain nombre de personnes qui appartiennent à une minorité sexuelle taboue, notamment des personnes qui sont pédophiles, hébéphiles ou pédérastes », lit-on encore.

Comme les diffuseurs de pornographie juvénile sont traqués activement tant par la police que par les fournisseurs de services internet, LATMS offrait aussi des services de sécurisation des échanges informatiques. Sur leur site, le groupe se vantait d'avoir aidé à la logistique pour l'organisation de consultations, rencontres ou échanges entre pédophiles.

Le président et secrétaire de l'organisme est André Faivre, qui fait face à 11 accusations et demeure détenu depuis la frappe policière. Il est considéré comme un leader du groupe.

«J'ai refusé de parler à la police»

Deux autres administrateurs de l'organisme n'ont pas été accusés pour l'instant : il s'agit de Denis Chupau, un Français domicilié à Saint-Herblain, dans le département de Loire-Atlantique, et de Jacques Beausoleil.

Ce dernier dit tout de même avoir reçu une visite des policiers et se sait dans la ligne de mire. Interrogé sur son militantisme pro pédophilie, il est catégorique. « Je n'ai pas l'intention d'abandonner ! Je fais juste le suspendre, en attendant que la tempête passe, et plus tard je vais probablement le reprendre avec d'autres », dit-il.

« J'ai refusé de parler à la police, j'ai refusé de parler catégoriquement », dit-il.

Il dit avoir voulu promouvoir l'ouverture envers les pédophiles, mais refuse maintenant de débattre du sujet « tant que le débat sera au niveau criminel ».

« Mon action militante a toujours eu pour but d'emmener les gens à faire un bon débat public, mais pas dans un contexte comme celui-là », dit-il.

Par ailleurs, selon nos informations, les enquêteurs de la SQ ont dans leur ligne de mire au moins une dizaine de personnes qui n'ont pas été accusées faute de preuves, pour l'instant, mais qui gravitaient autour du réseau.

Deux de ces personnes se seraient impliquées dans une chorale destinée aux enfants dans la région montréalaise, qui s'annonçait abondamment sur l'internet. Un autre se prétend psychologue et offre des services d'aide.

PHOTO FOURNIE PAR LA SÛRETÉ DU QUÉBEC

André Faivre, 67 ans.