Près de six semaines après le déraillement catastrophique, il n'y a plus de trace de pollution dans les eaux de la rivière Chaudière et du lac Mégantic, mais le pétrole qui recouvre encore les berges et le fond de la rivière continuera, jusqu'à nouvel ordre, de faire planer un risque de contamination.

C'est ce qui ressort des résultats d'analyse publiés hier par le ministère du Développement durable, de l'Environnement, de la Faune et des Parcs (MDDEFP). «Une tendance à la baisse est observée pour les hydrocarbures pétroliers (C10 - C50), le principal contaminant déversé lors de l'accident à Lac-Mégantic», affirme le Ministère dans un communiqué.

«Les analyses démontrent le respect des critères de qualité relatifs à la protection de la vie aquatique tant pour les effets à court terme qu'à long terme. L'eau de surface présente ainsi une qualité suffisante pour ne pas nuire à long terme aux espèces aquatiques», lit-on.

En ce qui concerne l'eau potable, les restrictions d'usage sont maintenues pour les systèmes d'aqueduc, même si «les résultats d'analyses ne démontrent pas de concentrations préoccupantes par rapport à l'approvisionnement».

«Des hydrocarbures pourraient en effet se décoller des berges et du fond de la rivière en raison de crues ou de changements brusques des niveaux de l'eau», explique le Ministère.

Optimiste quant aux résultats, le ministre de l'Environnement reste néanmoins prudent pour la suite des choses. «Je n'exclus rien. Depuis le début, je dis qu'il y a un niveau d'imprévisibilité dans cette catastrophe, car c'est quelque chose que nous n'avons jamais connu auparavant, donc il y a un potentiel de surprise et de mauvaises surprises dans le dossier», a dit Yves-François Blanchet.

Le ministre s'engage également "à rendre disponible l'ensemble des données au fur et à mesure qu'il y aura de nouveaux aspects et de nouvelles données» qui lui seront acheminés.

D'autres données

Cette divulgation en vrac des résultats d'analyse survient au lendemain de la publication de données alarmantes, mais incomplètes par la Société pour vaincre la pollution (SVP) et Greenpeace.

Hier, Anne-Marie Saint-Cerny, de la SVP, se réjouissait de la divulgation de ces résultats, tout en affirmant qu'ils étaient eux aussi incomplets.

Dans ses propres analyses, la SVP a constaté une pollution élevée sur les berges de la rivière, équivalant à 180 fois le critère des sols contaminés.

«On reste sur notre faim parce qu'on a les résultats de l'eau, mais pas ceux des berges et des sédiments, ni ceux des tiers qui ont travaillé sur le terrain», dit-elle.

Elle accuse le ministre Yves-François Blanchet de minimiser la pollution sur les berges dans des entrevues données hier.

«Le ministre reconnaît qu'il y a de la pollution de façon sporadique, mais nous, on observe de la contamination sur les deux berges, sur 70 km», dit-elle.

Par ailleurs, les résultats du Ministère ne font état d'aucune contamination à l'arsenic, alors qu'un échantillon de pétrole sous forme de mousse prélevé à la surface de la rivière en contenait un taux élevé.

Grégory Patience, professeur titulaire de génie chimique à Polytechnique Montréal, accuse la SVP de «faire peur à tout le monde» avec des analyses "incomplètes" et "incohérentes"», mais il reproche aussi au MDDEFP de ne rien publier sur la contamination des berges. «Il y a d'autres analyses à faire», dit-il.

- Avec Caroline D'Astous