Les autorités continuaient d'enquêter sur les causes de la tragédie de Lac-Mégantic, au quatrième jour de la tragédie, alors que des renseignements fournis par l'entreprise au centre de la controverse et par le ministre fédéral des Transports étaient contredits.

Seuls deux corps supplémentaires ont été extirpés du centre-ville rasé, ont annoncé les policiers, expliquant que la zone était jonchée d'embûches. Une cinquantaine de victimes probables manquent toujours à l'appel.

«On a tout près de 200 policiers sur le terrain et environ une soixantaine d'enquêteurs, a indiqué Michel Forget, grand patron des communications à la Sûreté du Québec. Pas plus tard qu'hier, deux membres de la Sûreté du Québec ont dû être retirés après des faiblesses. Il y a toujours du danger sur cette scène-là.»

La négligence criminelle est «l'une des thèses qui est envisagée» dans l'enquête de la SQ, a-t-il ajouté. Les policiers font de leur mieux pour récupérer le plus d'«éléments de preuves potentiels qui pourraient éventuellement permettre le dépôt d'accusations criminelles» contre un ou plusieurs individus.

Il s'agit de l'une des plus importantes enquêtes de l'histoire de la Sûreté du Québec, a-t-il ajouté.

Comme à leur habitude, les policiers n'ont pas fourni de détails sur les circonstances de la découverte des nouvelles dépouilles, notamment sur le lieu où elles ont été retrouvées. Les corps sont tous transportés à Montréal pour être identifiés, même si l'équipe terrain du Bureau du coroner s'agrandit de jour en jour.

Pas d'inspection sur la locomotive

Contrairement à ce que le ministre fédéral des Transports, Denis Lebel, avait affirmé lundi, la locomotive au centre de l'enquête n'avait pas été inspectée, a confirmé un haut fonctionnaire du Ministère.

«Le train a été inspecté vendredi. Le résultat est qu'aucun défaut n'a été trouvé. [...] Les locomotives n'ont pas été inspectées parce qu'elles n'étaient pas encore là», a indiqué Luc Bourdon, responsable de la sécurité ferroviaire à Transports Canada.

La veille, le ministre Lebel avait utilisé l'inspection réalisée sur la locomotive comme preuve du leadership de son gouvernement en matière de sécurité.

Mardi, il a indiqué avoir reçu des renseignements douteux de la part de son personnel. «L'information qu'on m'a donnée hier [lundi] était erronée. Ce sont les wagons qui ont été inspectés, a-t-il admis. Je n'ai pas de date quant à la dernière fois qu'on a vérifié les locomotives.»

La locomotive retient l'attention parce que c'est à la suite de l'incendie qui s'y est déclenché que le moteur a été coupé. Et cette manoeuvre pourrait avoir un lien avec les défaillances du système de freinage.

Cette hypothèse est d'ailleurs sur la table du Bureau de la sécurité des transports (BST), qui fait aussi enquête sur la tragédie.

Mardi matin, l'organisme fédéral avait convoqué la presse pour exposer une chronologie préliminaire des faits.

Celle-ci entrait en contradiction avec l'information donnée par le président de RailWorld la veille.

Selon le BST, le «contrôleur» de la MMA aurait été averti très rapidement après le déclenchement d'un incendie dans une locomotive du «train de la mort», vendredi soir. Un autre employé de l'entreprise - pas le chauffeur - aurait aussi participé à l'extinction de l'incendie de locomotive à Nantes, un village situé à quelques kilomètres de Lac-Mégantic.

Lundi, dans une entrevue avec La Presse, le grand patron de la MMA avait montré du doigt les pompiers de Nantes comme grands responsables de la tragédie. Il a nuancé sa version des faits mardi.

1200 réintégrations

Pour les résidants de Lac-Mégantic, la journée a surtout été marquée par le retour au bercail du cinquième d'entre eux. Environ 1200 personnes auparavant évacuées ont pu réintégrer leur maison. Il s'agit surtout du quartier Fatima, piégé samedi et dimanche sous le panache de fumée noire.

Le retour à la maison s'est assez bien déroulé, a indiqué la mairesse Colette Roy-Laroche.

Lors du même point de presse, en fin d'après-midi, elle a accepté pour l'une des premières fois d'aborder la reconstruction à moyen terme de sa ville. Elle a notamment exprimé son opposition à voir d'autres trains traverser la rue principale de la municipalité en plein dans son centre-ville.

«Je veux que nous puissions identifier et réaliser un nouveau trajet», a indiqué l'élue.

Mme Roy-Laroche a ajouté que les assureurs de la Ville étaient à évaluer les dommages financiers causés par la tragédie.

Elle n'a toutefois pas été en mesure d'estimer ni le coût de la reconstruction du centre-ville, ni celui de la déviation de la voie ferrée.

Mme Roy-Laroche a aussi rencontré le chef libéral Philippe Couillard. Celui-ci a proposé la création d'un guichet unique du gouvernement du Québec pour faciliter la tâche des sinistrés qui devront affronter une bureaucratie labyrinthique.