Alors que les autorités ont annoncé dimanche que le bilan de la tragédie de Lac-Mégantic s'élève désormais à 13 morts, sans compter la cinquantaine de personnes manquant toujours à l'appel, le président de la Montreal, Maine & Atlantic Railway (MMA), Ed Burkhardt, a accusé les pompiers de la municipalité de Nantes d'être responsables de la catastrophe.

«Les pompiers ont répondu à l'appel d'un citoyen concernant un incendie sur l'un des moteurs du convoi. À ce qu'on m'a dit, ils se sont rendus sur place et ont utilisé un extincteur à main pour l'éteindre. Pour ce faire, ils ont aussi arrêté les moteurs de la première locomotive. C'est ce qui aurait provoqué la suite des événements», a affirmé à La Presse le président de l'entreprise, Ed Burkhardt.

Selon lui, la pression des freins aurait été desserrée lorsque les pompiers ont éteint les moteurs de la locomotive. Le train se serait mis en marche par la suite, terminant sa course folle 10 kilomètres plus loin, au centre-ville de Lac-Mégantic. M. Burkhardt a dit qu'aucun employé de son entreprise n'a été consulté par les pompiers de Nantes lors cette manoeuvre.

«Je ne sais pas combien de temps s'est écoulé entre l'intervention des pompiers sur notre convoi et le moment où nous avons été informés que le moteur de la locomotive avait été éteint. De toute façon, lorsque nous l'avons su, il aurait été trop tard. Le convoi aurait déjà atteint Lac-Mégantic, avant même que nous puissions envoyer quelqu'un rétablir les freins», a poursuivi M. Burkhardt.

Le chef du service de sécurité incendie de la municipalité de Nantes, Patrick Lambert, réfute ces accusations. Il affirme que les 12 pompiers qui sont intervenus sur l'incendie ont respecté le protocole d'intervention que l'entreprise leur avait enseigné.

«Quand on est arrivés, la locomotive fonctionnait. C'est nous qui l'avons arrêtée, par sécurité. C'est dans le protocole d'intervention de MMA, il faut couper le moteur», a-t-il dit.

M. Lambert a aussi précisé que son équipe n'en était pas à sa première intervention auprès de cette entreprise. Son équipe a été appelée d'urgence à quatre reprises au cours des huit dernières années.

Le bilan augmente

Alors que la Sûreté du Québec ne pouvait accéder à toute la zone dévastée samedi et dimanche, le sergent Benoît Richard a annoncé lundi soir que l'ensemble du périmètre leur était maintenant accessible. Cela comprend le Musi-Café, le bar qui fait l'objet de toutes les inquiétudes.

«Jusqu'à maintenant, nos policiers ont réussi à trouver 8 victimes de plus, ce qui porte le total du nombre de victimes à 13», a expliqué Benoît Richard. Cinq d'entre elles ont déjà été transportées jusqu'aux laboratoires du coroner à Montréal pour être identifiées.

D'une quarantaine en matinée, la liste des personnes qui manquent à l'appel est passée à 50 en fin de journée. Les résidants de Lac-Mégantic entretiennent peu d'espoir quant à la possibilité que certains d'entre soient encore vivants.

Poursuites possibles

La mairesse de Lac-Mégantic a finalement pu discuter avec le président de la MMA, Ed Burkhardt, plus de 60 heures après la tragédie.

«Ce fut une rencontre satisfaisante, a indiqué Colette Roy-Laroche. Évidemment, comme c'était une première rencontre, vous comprendrez que nous n'avons pas élaboré sur la suite des choses.»

Pressée de questions, elle a laissé entendre qu'un recours légal était dans le domaine du possible.

«Écoutez, il y a des procédures légales. On s'entretiendra avec nos représentants légaux à cet effet», a-t-elle affirmé.

Questionné sur son absence sur les lieux de la tragédie, M. Burkhardt a confirmé à La Presse qu'il prendra un vol mardi en direction de Montréal pour se rendre à Lac-Mégantic «le plus tôt possible».

Il a aussi critiqué les élus municipaux pour leur manque d'accessibilité.

«Nous avons une dizaine d'employés, dont un de nos hauts directeurs présents sur place. Nous avons toutefois eu beaucoup de difficulté à joindre le bureau de la mairesse. Personne ne nous rappelle», a dit pour sa défense M. Burkhardt.

Nouvelles visites de politiciens

Le ministre des Transports du Canada, Denis Lebel, a visité la communauté dévastée lundi après-midi.

Dans une allocution très politique, il a souligné que «99,9%» des millions de transports de matières dangereuses par train se déroulaient sans problème au Canada chaque année, tout en défendant le bilan de son gouvernement.

«Nous n'avons pas supprimé de postes d'inspecteurs, c'est une fausseté galvaudée par l'opposition», a-t-il lancé.

Le chef du Parti libéral du Canada, Justin Trudeau, était également de passage dans la région. Après avoir rencontré des sinistrés à la polyvalente et visité une partie de la zone sinistrée, il a comparé Lac-Mégantic à Pompéi, cette ville de la Rome antique ensevelie sous la lave volcanique.

- Avec La Presse Canadienne