Le témoignage de l'ex-maire Gilles Vaillancourt devant la commission Charbonneau s'annonce de moins en moins probable. L'enquête publique a décidé de mettre un terme au «chapitre Laval» pour tourner son attention cet automne sur l'infiltration du crime organisé dans l'économie légale, particulièrement auprès du Fonds de solidarité FTQ.

Les audiences publiques de la Commission reprendront mardi matin, après 10 semaines de pause. Elles avaient été suspendues le 19 juin avec le témoignage de l'ex-directeur général de Laval, Claude Asselin, qui avait reconnu avoir pris part au partage des contrats. Arrêté le 9 mai par l'Unité permanente anticorruption (UPAC), l'homme a été accusé de gangstérisme avec l'ex-maire Vaillancourt et l'ex-directeur du service de génie, Claude Deguise.

Plusieurs s'attendaient à voir ces deux derniers défiler devant la Commission afin de mettre un terme au volet de l'enquête publique centré sur Laval. Après tout, on avait entendu les explications de l'ex-maire Gérald Tremblay avant de clore le chapitre montréalais, en avril. De plus, Claude Deguise s'était présenté en juin à la Commission pour contester sa sommation à comparaître.

«Chapitre Laval» clos

Mais voilà, nos sources indiquent maintenant que la Commission considère en avoir terminé avec le «chapitre Laval». Cette portion de l'enquête publique aura ainsi duré un mois, contre six mois pour Montréal. La procureure en chef de la Commission, Me Sonia LeBel, doit prononcer mardi matin une allocution d'ouverture pour relancer les travaux publics. C'est à ce moment qu'elle dévoilera les grandes lignes que suivra l'enquête publique cet automne.

Le témoignage de Gilles Vaillancourt devient ainsi peu probable maintenant que l'attention de la Commission se tournera davantage vers le monde syndical. Le nom de l'ex-maire a rebondi à plusieurs reprises à l'enquête publique, mais toujours en lien avec les contrats de la Ville qu'il a longtemps dirigée. L'avocate de Gilles Vaillancourt, Nadine Touma, n'a pas rappelé La Presse.

Automne syndical

Après avoir étudié en profondeur le système montréalais, puis lavallois, la Commission s'attaquera de plein fouet à l'infiltration du crime organisé dans l'économie légale, selon nos informations. Une attention particulière sera portée à la FTQ-Construction qui a été éclaboussée en 2009 par le témoignage du syndicaliste Ken Pereira à l'émission Enquête de Radio-Canada.

Six membres du syndicat ont reçu des sommations à comparaître cet automne, a-t-on appris. L'actuel directeur général de la FTQ-Construction, Yves Ouellet, en poste depuis mai 2010, confirme avoir reçu une sommation pour témoigner. Il ignore toutefois s'il sera bel et bien appelé à la barre, précisant ne pas encore avoir été invité à rencontrer les enquêteurs de la Commission pour préparer un éventuel témoignage. «On a toujours dit que s'ils avaient des questions à poser, on allait répondre», a-t-il dit à La Presse, assurant n'avoir rien à se reprocher.

Des policiers de la Sûreté du Québec seront appelés à témoigner, notamment pour décrire l'opération Diligence, lancée en 2007 pour mettre au jour l'infiltration du crime organisé dans l'économie légale. Cette vaste enquête avait permis l'arrestation du motard Normand Casper Ouimet. Une enquête ayant découlé de l'écoute électronique dans cette affaire avait quant à elle mené à l'arrestation de l'ex-directeur de la FTQ-Construction, Jocelyn Dupuis.

Écoute électronique

Beaucoup de bandes obtenues grâce à l'écoute électronique découlant de Diligence devraient d'ailleurs être écoutées par la commission Charbonneau cet automne. L'enquête publique a en main de nombreux enregistrements faits par les policiers et compterait s'en servir pour confronter les nombreux témoins réfractaires.

Déjà, certains de ces enregistrements ont servi le printemps dernier, lorsqu'il a été question de la FTQ-Construction, lors du témoignage de l'entrepreneur Joe Borsellino, en février dernier. Il a reconnu avoir été très près de Jocelyn Dupuis, lui fournissant un luxueux appartement et de nombreux cadeaux. Le témoignage avait permis de comprendre que les entrepreneurs Joe Borsellino et Tony Accurso s'étaient livrés à un bras de fer pour avoir accès au Fonds de solidarité FTQ.

Montréal et Laval

Tony Accurso devrait d'ailleurs témoigner lui aussi devant la Commission. L'homme arrêté à trois reprises depuis deux ans conteste d'ailleurs devant les tribunaux sa sommation à comparaître. Au-delà de ses activités auprès du Fonds de solidarité FTQ, M. Accurso risque fortement d'être interrogé sur ses activés à Montréal et à Laval, ramenant à l'avant-plan la gestion de ces deux villes.